
La femme ferme les yeux. Elle recule, sans doute intimidée par ma présence.
« Que fais-tu ici ? »
« Je pourrais te demander la même chose. » Je fais un pas dans la pièce. « Pourquoi as-tu sauvé Pasado ? »
« Pourquoi as-tu essayé de le tuer ? », réplique-t-elle en se redressant.
« Toi d’abord. » Je fais un geste avec mon Beretta. « T’es pas vraiment en position d’ignorer mes questions, petite dame. »
« J’pense que t’es dépassé par les événements… et que t’en as même pas idée », poursuit-elle.
« Une fille sans arme qui parle », je réponds.
Avant que je n’aie le temps de comprendre ce qui se passe, elle lance une dague depuis la paume de sa main. La lame s’enfonce dans un coin de porte à quelques centimètres de ma tête.
Ma main se resserre autour de l’automatique. « C’est quoi ce bordel ! ? »
« Un avertissement », dit-elle en s’approchant de moi. « La prochaine fois, je te plante entre les deux yeux. »
« Pourquoi les Cavaliers de Tyr veulent-ils la mort de Javier Pasado ? » demande-t-elle froidement.
« Comment sais-tu que je suis avec les Cavaliers ? »
« Ton encre. » Elle sourit avec ses lèvres pleines et séduisantes.
Un instant, je me demande quel goût elles ont.
« ~T’es sourd ? Tu m’réponds ? »
Je la fixe, abasourdi, en faisant de mon mieux pour soutenir son regard.
Ses courbes sont comme… comme…
J’essaie de dissiper le brouillard mental qui encombre mes pensées et de me concentrer sur la tâche à accomplir.
Soudainement, l’arme pèse une tonne dans ma main.
Mon doigt de gâchette se crispe.
Tremblements.
Comme si elle lisait dans mes pensées, elle plonge vers l’avant en un saut périlleux et se relève.
Avec le coup de pied circulaire le plus rapide que j’ai jamais vu, elle fait voler le pistolet de ma main.
Il dérape sur le sol puis sous le lit.
J’esquive de justesse son direct du gauche, je me retourne pour lui bourrer les flancs avec mes épaules. En fonçant sur elle de tout mon poids, je l’envoie voler sur la table basse en verre.
Le meuble se brise sous elle, elle se retrouve sur le cul, toussotant au milieu d’un tas de verre brisé.
Mais je n’ai pas le temps d’y penser, parce que tout à coup, elle est de nouveau sur pied, volant vers moi comme un putain de singe-araignée sous l’effet du crack, dans une sorte de mouvement de gymnastique à vous faire perdre votre place aux J.O.
Ses jambes se précipitent vers mon visage, s’enroulent autour de mon cou et m’étranglent.
Je n’ai jamais combattu quelqu’un comme ça dans ma vie.
C’est tellement…
Elle me tire vers le sol avec ses jambes, resserrant sa prise autour de mon cou, et je suis soudain conscient de la proximité de mon visage avec ses parties féminines.
En fait, je peux sentir une légère chaleur venant de la couture de ses leggings…
Je suis allongé sur le dos, haletant, la tête dans son entrejambe, tandis qu’elle se penche calmement sur moi. Ses yeux perçant les miens, je me rends compte que je pourrais ne pas gagner ce combat.
Ce serait une première.
« Tu réalises à quel point tu as tout foutu en l’air pour moi ? » Elle serre encore ses cuisses, contraignant ma trachée. Je peux sentir mon visage devenir violet.
Elle tire quelque chose de ses cheveux — une longue épingle à cheveux argentée avec une extrémité pointue.
Un autre couteau !
Mes bras s’agitent pour agir, n’importe quoi, comme enlever son cul serré de ma gueule.
Je commence à voir des mouches noires maintenant.
Mes poumons sont en feu.
Et elle joue seulement avec moi.
« Je ne vais jamais être capable de l’atteindre maintenant. Pas à moins que… » Je m’éloigne, au fond de mes pensées.
Cet aspirant Viking a réussi à s’emparer d’un tesson de verre sur le sol. Il me frappe à l’aveuglette, me tailladant l’épaule.
Je perds mon étreinte sur son cou pendant une fraction de seconde, ça lui suffit pour s’emparer de ma taille. Il me jette tête première sur le tapis, et je fais un saut périlleux vers le verre brisé.
L’épingle à cheveux me glisse des mains et rebondit sur le tapis.
Bon sang, ce type est fort…
Chaque fois que sa peau touche la mienne, je ressens la même électricité que lors de notre première rencontre. Quelque chose qui remue au fond de moi.
Mon cœur se serre, me demandant ce que ses mains pourraient ressentir si elles n’étaient pas en train d’essayer de me tuer.
J’atterris sur mes pieds en position accroupie, dos tourné.
Au moment où je sens qu’il me charge, je fais un saut périlleux en arrière, m’accroche à ses épaules en plein vol et le plaque au sol.
« Putain », bafouille-t-il en toussant, allongé sur le dos.
Je suis sur le ventre, face lui, sur le point de me jeter sur son torse et d’en finir, quand il donne un coup de pied dans la commode en bois, faisant basculer le vieux téléviseur sur ma poitrine.
Le moniteur se brise tout autour de moi.
Nous restons tous les deux allongés pendant une seconde, essayant de reprendre notre souffle, préparant nos prochains mouvements.
« Tu vas bien, mon grand ? » je lui siffle, en tordant le cou pour voir s’il est toujours au sol.
« À tout bien considérer », répond-il, presque effrontément. « Et toi ? »
« Jamais été aussi bien. » Je retire lentement la carcasse détruite de mon corps et me pousse sur mes pieds, me retournant pour lui faire face.
Il est debout maintenant, et a relevé ses longs cheveux noirs en un chignon.
La sueur coule sur son front, se frayant un chemin dans sa barbe.
Je n’ai jamais été aussi excitée de toute ma vie.
Je le charge une fois de plus, et il attrape le premier coup de poing que je lui donne, son poing massif frôlant le sommet de mon crâne.
Au moment où j’envoie un rapide direct du droit dans ses côtes, il baisse ses épaules et se jette à nouveau sur moi, me poussant vers l’arrière.
J’enroule mes bras autour de lui, l’attirant vers moi tandis que je reviens en volant.
Mais cette fois, quelque chose d’autre brise ma chute.
Le lit.
Il est complètement allongé sur moi, au centre du lit, et nos corps se pressent l’un contre l’autre. Je peux sentir chaque soulèvement de sa poitrine alors qu’il peine à respirer.
Le battement rapide de son cœur.
On est pratiquement nez à nez, à se mirer dans les yeux.
Et c’est là que je réalise…
Aucun de nous ne fait quoi que ce soit.
Ses lèvres s’approchent dangereusement des miennes et, tandis que je regarde ses magnifiques yeux verts, dans lesquels je décèle des petites taches d’or, j’ai l’impression qu’il pense la même chose.
Chaque centimètre de mon corps le désire.
Y compris…
Mes yeux descendent vers mon entrejambe, ou son entrejambe, ou l’endroit où ils se sont unis ensemble.
Parce que le sien est très dur avec moi.
Ou devrais-je dire… dur en érection.
Je suis complètement essoufflée. La tentation m’envahit presque.
Au moment même où ses yeux s’écarquillent, réalisant la même chose, je déplace mon poids, le faisant rouler sur le dos, de façon à être à califourchon sur lui.
Je peux le sentir devenir encore plus dur maintenant.
Ni une ni deux, je plonge sous le lit, y fouillant à tâtons, jusqu’à trouver ce que je cherche.
« Échec et mat. » Je pointe le canon sur lui, un sourire mauvais aux lèvres.
« Toi… »
« À plat ventre », je l’interromps en faisant signe avec l’arme. « Mains derrière le dos. »
Je l’observe chercher une issue, réaliser qu’il n’en a pas, et faire ce qu’on lui demande.
L’arme toujours pointée sur lui, je me dirige vers mon sac à main et en retire les menottes que j’avais réservées pour Pasado.
Je grimpe sur son dos, escaladant sa silhouette ciselée maintenant en sueur, lui fixant les poignets à la hâte. « Putain, t’es qui ? » grogne-t-il en essayant de s’extraire des menottes.
« Dis-moi pourquoi les Cavaliers de Tyr veulent Pasado mort. »
Je fais le tour pour le regarder. Un moment, il soupire en silence puis lève les yeux vers le pistolet.
« Il a mené des raids contre nous. Il a volé nos cargaisons », admet-il finalement.
« Votre président a donné l’ordre ? »
« Vois-tu, voilà le truc… » Je fais les cent pas devant lui, me mordant la lèvre, et mon esprit s’emballe. « J’ai besoin de lui. Vivant. »
« Pourquoi ? »
« Sa tête est mise à prix. Une grosse prime. Et c’était déjà un travail assez difficile, presque impossible à réaliser seule — et puis il a fallu que tu arrives et que tu fasses tout foirer. Maintenant je ne l’aurai jamais seule. »
« Alors quoi, t’es une sorte de flic ? » demande-t-il avec une consternation manifeste.
Il ne dit rien… sa fierté sans doute blessée.
« Je suis une chasseuse de primes », je dis. Alors que je fixe ce motard incroyablement séduisant — un homme que le destin semble avoir placé sur mon chemin juste pour m’emmerder — je commence à élaborer un plan.
« À quelle distance se trouve votre club-house ? »
Il tord son cou pour me fixer avec incrédulité. « Quoi ? »
« Tu m’as compris. »
« Une heure, peut-être. »
« Emmène-moi là-bas », dis-je en croisant les bras.
« Tu te fous de moi ? »
« Pas le moins du monde ». Je ne peux pas m’empêcher de sourire.
« Il est temps que votre roi et moi ayons une petite discussion. »