River traverse le pays en cavale. Elle est loin de se douter qu'elle va entrer en chaleur pour la première fois depuis deux ans. Elle n'a pas l'intention d'attirer l'attention de l'Alpha, mais lui a bien l'intention de l'attraper.
Lorsque l'alpha capte son odeur, il a la ferme intention de l'attraper. Même les cicatrices du passé ne peuvent l'empêcher de la retenir.
RIVER
J'ai jeté ma valise sur le lit d'ami et j'ai pris un moment pour savourer ce rare instant de silence. Cela faisait si longtemps que je n’avais pas eu un moment de paix. Je me suis demandée si j’en trouverais ici.
« Dépêche-toi ! On va être en retard pour la course ! » La voix de ma cousine m'est parvenue du rez-de-chaussée, interrompant mes quelques précieuses secondes de tranquillité.
Je me suis affalée sur le lit à côté de mes bagages en grognant. « J'arrive, Arlene ! »
Je n'avais pas voulu arriver la nuit de la pleine lune, et je ne voulais certainement pas courir avec une meute alors que les seules personnes que je connaissais étaient ma cousine, ma tante et mon oncle. Les loups n'aiment pas courir avec des étrangers, et puisque ce n'était pas ma meute, j'étais sérieusement nerveuse à l'idée de courir avec eux.
Mais ça faisait plus d'une semaine, et mes os criaient de douleur à l'idée de me transformer.
Bien que je me sois sentie coupable, je suis restée sur le lit quelques minutes de plus pour être sûre d’être vraiment en retard.
« River ! » La voix d'Arlene retentit à travers la porte. « Je sais que tu viens d'arriver, mais il faut vraiment qu'on y aille. Le soleil est déjà couché et ma peau commence à me démanger ! »
« J'arrive ! » Je me suis levée d'un bond et j’ai ouvert la porte de la chambre d'amis. Les yeux marron de ma cousine semblaient me transpercer pendant qu'elle sautillait nerveusement d'un pied à l'autre.
« L'alpha n'aime pas quand on est en retard. Allez, viens ! » Arlene a attrapé ma main et m’a tirée hors de la chambre et dans les escaliers.
Les courses de pleine lune sont importantes pour une meute. C'est un excellent moyen de renforcer les liens et les relations. Et juste à ce moment-là, ma louve a hurlé pour être libérée. Ma cousine a frétillé de la même énergie.
On ne peut pas résister à l'appel de la pleine lune. Contrairement aux humains, les loups sont guidés uniquement par leurs instincts, qui dirigent nos actions et nos décisions.
La forêt sentait merveilleusement bon, pleine de pins frais et de l'arôme terreux de la terre, et j’ai inhalé avidement le parfum. C'était tellement différent de la région à laquelle j'étais habituée chez moi.
Un étrange pincement a traversé mon estomac, mais le bruit d'une foule parlant avec excitation au loin m’a détournée de mes pensées. Arlene a accéléré le pas, et bientôt, nous étions presque en train de courir vers la meute rassemblée.
« Ils ne sont pas encore partis ! On arrive juste à temps ! » Nous avons rejoint l’énorme foule dans la clairière entre la maison de la meute et la forêt. «Pff, je ne vois pas l'alpha d'ici ! »
« Et alors ? » J’ai roulé des yeux en voyant Arlene agir comme une adolescente amoureuse. On était dans notre vingtaine, et elle tombait amoureuse de chaque garçon qu'elle croisait.
« Il donne généralement un discours avant les courses de pleine lune, mais je suppose qu’on a raté cette partie. »
Un hurlement a résonné dans l'air au-dessus de nos têtes, et c'est à ce moment-là que l'énergie de la transformation nous a tous traversés.. Comme une vague d'électricité, elle s’est propagée de l'avant de la foule jusqu'à moi et Arlene à l'arrière.
Il est difficile d'ignorer la puissance d'un hurlement d'alpha combinée à la présence de la pleine lune, surtout quand elle traverse un groupe de loups.C'est comme un appel à ton esprit, qui t'incite à libérer la bête qui sommeille en toi.
Des vêtements ont été jetés et déchirés précipitamment alors que toute la meute se transformait en animaux à quatre pattes et s'élançait dans la forêt.
La seconde d'après, j’ai secoué ma fourrure toute légère, dorée et rousse en poursuivant le derrière gris et poilu d'Arlene. La sensation de tension dans ma peau a disparu et j'ai eu l'impression de prendre une véritable bouffée d'air frais alors que la pression de la transformation me traversait.
Les grands pins sont devenus flous alors que la meute s'enfonçait dans la forêt. L'air frais de la nuit était incroyable lorsqu'il traversait ma fourrure. J’ai aperçu des éclats de lune à travers les cimes des arbres, et personne n’a pu retenir les hurlements ou les aboiements d'excitation quand l'odeur du cerf à queue blanche est parvenue jusqu'à nous
Mais soudain, une vague d'agonie a traversé tout mon être, immobilisant mes pattes sur le sol terreux. Ce n'était pas censé être le moment pour moi, et pourtant, ici, sous la pleine lune et au cœur de cette forêt de pins avec une meute étrangère, ça m’arrivait..
Un léger gémissement m’a échappé, et j’ai laissé la meute continuer sans moi. À chaque instant qui passait, la douleur atroce s'atténuait progressivement, et me permettait de marcher prudemment sur les feuilles mortes et les aiguilles de pin piquantes sous mes pattes.
Ça ne pouvait pas m’arriver.
J’étais en chaleur.
J'avais déjà mis ma conscience humaine au second plan. Les instincts de ma louve me guidaient. Si j'avais su que cela allait arriver, je me serais enfermée dans la chambre d'amis.
Une autre crampe m’a prise. J’ai ressenti la chaleur atteindre mon corps alors qu’un besoin quasi-douloureux s’est éveillé en moi. Il ne fallait que quelques instants pour que mon odeur se répande, et que tous les mâles dans ces bois deviennent des prédateurs et que je devienne soudainement la proie..
Ce qui restait de ma conscience humaine m’a suppliée de retourner à la maison et de trouver un abri pour la nuit. Alors, en suivant mon odorat, j’ai fait demi-tour dans la direction qu’on avait prise plus tôt en essayant de rentrer au refuge de la meute.
Mais ma louve avait d'autres idées en tête. Elle a grogné dans ma tête quand elle a perçu l'odeur de tous les mâles qui étaient passés par là. Elle en voulait un.
Lorsque les louves sont en chaleur, ça active l'instinct le plus profond qu'on a en nous. Même si on ne se transforme pas pendant une pleine lune, quand on est affectées par cette fièvre, il est difficile d'ignorer l'appel de nos désirs primordiaux.
Ils sont dangereux.
Je pensais pouvoir retourner à la maison avant de perdre complètement le contrôle. Toutefois, les odeurs entremêlées dans la forêt m'ont désorientée, et m'ont laissée incertaine de ma position.
Je n'avais pas peur. Être perdue dans les bois n'était pas quelque chose qui m'effrayait.
Mais le bruit de pattes puissantes grondant sur le sol au loin m'a noué l'estomac.. Au même instant, j'ai entendu le hurlement d'un loup en train de chasser.
Il était proche.
Bondissant par-dessus un ruisseau, j’ai poussé mes pattes pour avancer le plus vite possible. C'est alors que j’ai vu son ombre courir à mes côtés à travers les buissons.
Il était immense, et sous la lumière de la lune, j’ai remarqué la beauté de sa fourrure noire.
Ma louve a pris les commandes.
C'était une chance pour elle de tester le mâle, qui était maintenant à la poursuite d'une louve en chaleur. Un frisson m’a parcouru la colonne vertébrale. Et soudain, c’est devenu un jeu.
En chaleur, ma louve savait que si ce mâle pouvait me rattraper, il méritait de m'avoir.