Plusieurs semaines s'étaient écoulées depuis ma rencontre avec l'Alpha Farris, mais je n'avais eu aucune nouvelle de lui. J'ignorais ce qu'il pensait, mais les membres de la meute me traitaient encore plus durement qu'auparavant.
Des rumeurs malveillantes circulaient à mon sujet. On me traitait de menteuse, de désespérée. On me crachait dessus régulièrement.
La veille, quelqu'un m'avait poussée dans le fossé. Les loups alentour avaient ri et, tandis que je tentais de me relever, ils m'avaient jeté de la boue au visage.
J'avais le cœur lourd, mais je ne pouvais rien y faire. Je ne pouvais pas en parler à Alessa. Et il n'y avait personne d'autre à qui me confier qui s'en soucierait.
Assise sur mon vieux matelas usé, je serrais mes genoux contre moi, les larmes roulant sur mes joues.
Je ne m'étais jamais sentie aussi seule. Même à la mort de mon père, Alessa avait été là. Mais ces derniers temps, elle était trop occupée par son nouveau rôle de femelle Bêta.
Elle avait des responsabilités importantes, qui passaient avant notre amitié désormais, et je ne pouvais pas lui en vouloir. Je connaissais ma place. J'aurais simplement aimé...
Soudain, des cris retentirent, me faisant bondir de peur hors de mon lit.
Je percevais une légère odeur de sang venant de ma fenêtre ouverte, et j'entendais des grognements au loin ainsi que les hurlements des guerriers alertant la meute.
Je savais ce que cela signifiait. Quelqu'un attaquait la meute, peut-être une autre meute ou un groupe de rebelles. Tous les guerriers devaient aller se battre avec les membres importants de la meute.
Les membres qui avaient besoin de protection, comme les femelles non-guerrières, les Omégas, les anciens et les enfants, devaient se réfugier dans la Maison de la Meute pour être gardés par la Luna. Comme nous n'avions pas de Luna, la femelle Bêta, Alessa, remplirait ce rôle.
Je devrais me débrouiller seule.
Alessa ne viendrait pas me protéger cette fois, comme elle l'avait toujours fait auparavant. Maintenant, elle devait s'occuper du reste de la meute. Et je n'avais pas le droit d'aller à la Maison de la Meute pour être en sécurité.
Je serais livrée à moi-même, avec seulement les murs de ma cabane pour me protéger.
Je courus à toutes les fenêtres, les fermant rapidement, espérant survivre à la nuit. Je fermai les volets en bois pour empêcher tout attaquant de voir à l'intérieur.
Je courus à la porte et m'assurai de bien la verrouiller, puis poussai la table devant.
Je me recroquevillai en boule dans le coin le plus éloigné de la porte d'entrée. Scrutant l'obscurité, j'écoutais les bruits du combat, essayant de déterminer à quelle distance il se trouvait de ma cabane et guettant les sons de mes compagnons de meute.
J'espérais entendre un bruit qui m'indiquerait que le danger était passé.
Au lieu de cela, mes sens de louve m'avertissaient que le danger était plus proche que je ne le pensais.
Une odeur nauséabonde s'infiltra, et j'étais certaine qu'un rebelle était tout près. Le seul point positif était que c'était la pleine lune, donc je pourrais changer si nécessaire.
L'odeur nauséabonde s'intensifia et commença à envahir mes narines. Je ne pouvais presque plus penser à autre chose, ma peur se concentrant sur l'attaquant potentiel.
J'entendais des griffes gratter contre les planches à l'extérieur de ma cabane. Je me fis aussi petite que possible.
Je priai la Déesse de la Lune de me sauver la vie. Même si les choses allaient mal, je ne voulais pas mourir.
Quelque chose heurta violemment ma porte, puis la frappa à nouveau.
Utilisant mes yeux de louve pour voir dans l'obscurité, je regardai la porte commencer à se fissurer légèrement.
Des pensées terrifiantes traversèrent mon esprit.
Je pouvais dire à l'odeur que le rebelle était un mâle, et je savais qu'il pouvait me sentir aussi. S'il m'attrapait, il pourrait me tuer sur-le-champ. Mais j'étais une femelle sans compagnon, alors il pourrait aussi faire de moi son esclave... Ou quelque chose d'autre d'horrible.
Tant qu'il n'était pas entré, il ne pouvait pas me voir, ce qui pourrait me donner une meilleure chance de m'échapper. Mais il était peu probable que je m'en sorte sans être blessée.
La porte s'effondra, arrachée de ses gonds au moment où je pensais qu'elle allait se fendre en deux. La table ne l'arrêta pas beaucoup alors qu'elle était poussée sur le côté.
Un rebelle sale avec une fourrure emmêlée et désordonnée se tenait dans l'encadrement de ma porte. Il avait l'air sauvage, sa tête bougeant d'avant en arrière, reniflant l'air.
Il était clair que cette créature était plus animale qu'humaine. Je ne pourrais pas lui parler. Il chassait, et j'étais sa proie.
Sans autre choix, mon seul espoir était de changer et d'essayer de lui échapper d'une manière ou d'une autre.
Il n'y avait pas d'autre moyen d'éviter les horreurs qu'il voulait probablement me faire subir.
J'hésitai un instant, terrifiée. Je ne changeais pas souvent, et je craignais que cela ne se passe trop lentement, me laissant vulnérable à une attaque pendant ma transformation.
J'étais en colère contre moi-même de ne pas avoir pensé à changer avant d'être en danger immédiat.
J'étais vraiment la pire louve qui soit. Pas étonnant que ma meute me déteste. J'étais complètement inutile. Une honte pour tous les loups. Je prouvais que tout ce qu'ils pensaient de mal sur les loups de sang-mêlé était vrai.
J'étais sur le point de commencer à changer quand j'entendis un grognement. Ce moment d'hésitation m'avait coûté cher. Je commençai à trembler en regardant le rebelle s'approcher de moi.
S'échapper semblait de plus en plus impossible à chaque seconde. Et si ce rebelle ne m'attrapait pas, je craignais qu'un autre ne le fasse.
C'était maintenant ou jamais : changer en prenant le risque ou mourir en essayant quand même. Je pris une profonde inspiration, et puis...
Un hurlement puissant emplit l'air, faisant trembler les murs.
Ce hurlement ne venait certainement pas du rebelle. Il n'était pas assez fort.
Soudain, je sentis une odeur de menthe poivrée et de pin. Je savais qui avait poussé ce hurlement.
