Nieve & Thar'n (français)

Nieve

« Nieve ! »

La voix puissante de son maître la fit sursauter, et elle se précipita vers sa chambre.

Nieve trouva son maître faisant les cent pas dans sa chambre. Il était sur les nerfs depuis que le groupe de visiteurs avait accepté de loger chez eux. Il criait après elle, deux autres esclaves et ses enfants.

« Ah, te voilà. Où étais-tu passée ? » Il l'aperçut sur le pas de la porte. « Peu importe. J'ai besoin que tu prépares les chambres d'invités », dit-il d'un ton pressé. « Les plans ont changé et le groupe Darkiri arrive ce soir ! »

Les yeux de Nieve s'écarquillèrent. Aucune des chambres n'était prête. En ville, on parlait des Darkiri comme l'un des groupes les plus redoutables.

Zut alors !

Elle et Rose étaient seules. L'un des esclaves masculins qui donnait habituellement un coup de main avait été envoyé chez le fils d'Akila pour réparer un toit, et il ne rentrerait pas avant deux jours.

« Il faut que les trois chambres d'invités soient prêtes dans deux heures. » Ses yeux étaient sérieux, presque suppliants.

Nieve se redressa et hocha légèrement la tête. « Nous ferons de notre mieux, Maître. »

Un léger sourire se dessina sur les lèvres du grand homme. « Je sais, Nieve... Que ferais-je sans toi... »

Elle fila dans les couloirs à la recherche de Rose. « Que ferais-je sans toi... Tu parles... ~Il ferait peut-être mieux de dire à sa fille d'en faire plus ! C'était une brave fille, mais elle ne pensait qu'à se battre au lieu de chercher un mari. Si elle quittait la maison, ce serait beaucoup plus facile de gérer cette demeure et il y aurait moins de bazar.~

Mais Ayli, la fille de son maître, ne voulait pas trouver de partenaire. Elle avait déjà confié en secret à Nieve qu'elle ne voyait pas d'inconvénient à avoir quelques enfants, mais un partenaire... ce n'était pas dans ses projets.

Nieve trouva Rose à l'arrière de la maison dans le jardin, en train de s'occuper des plantes et des légumes.

« Rose, j'ai besoin de ton aide. Les invités n'arrivent pas dans deux jours. Ils arrivent ce soir ! »

La jeune fille se retourna avec un air ahuri. « Tu plaisantes ? On est vraiment dans de beaux draps ! Les draps justement ne sont pas secs, et... et les salles de bains... Je n'ai encore rien nettoyé. »

« Je sais, je sais. » Nieve porta une main à son visage. Elle se frotta le front où un léger mal de tête commençait à poindre. « On doit se répartir le travail. Il y a trois chambres à préparer. On va commencer par les tissus, puis les salles de bains, et on finira par les draps. Tu prends la chambre bleue et je m'occupe de la verte. On fera la jaune en dernier. »

« Maître Akila était en colère quand il te l'a dit ? » demanda Rose alors qu'elles se dépêchaient de rentrer pour se mettre au travail.

Nieve acquiesça. « C'est bizarre parce qu'il adore recevoir du monde. Les autres groupes de visiteurs ne le mettent jamais dans cet état. Mais il s'est un peu détendu quand j'ai dit qu'on ferait de notre mieux. »

« Qu'est-ce qu'il a ce groupe Darkiri ? Tu crois qu'il en a peur ? » Rose semblait songeuse. « Il ne nous crie jamais dessus, et il crie même sur ses propres enfants. »

Nieve n'aimait pas imaginer que Maître Akila puisse avoir peur de qui que ce soit. « On a tous entendu dire que les Darkiri ne sont pas comme les autres groupes. Ils sont plus dangereux. Maître Akila est un homme bon », dit Nieve. « Il nous protégera. »

Elles se séparèrent en rentrant. Nieve se précipita pour nettoyer la chambre verte. Elle ébouriffa les coussins en fourrure verte sur le canapé vert, et changea l'eau dans le bol pour que les invités puissent se laver les mains. Elle épousseta autour des bougies et des plantes.

Chaque chambre avait les mêmes meubles, et tous les meubles et décorations étaient assortis à la couleur de peinture sur la porte.

« Hé, tu t'es encore coupé les cheveux ? » Rose fronça les sourcils en la rejoignant dans la chambre jaune. Ses cheveux lui descendaient jusqu'à la taille. Elle les gardait toujours en tresses avec des perles, des plumes et des morceaux de tissu colorés.

« Ouais. Ils repoussaient trop vite encore une fois... » Nieve vit Rose secouer la tête d'un air désapprobateur.

« Pourquoi tu ne veux pas t'intégrer ? Je veux dire, avec tes cheveux courts, tu te fais remarquer. » Rose glissa un oreiller dans une taie propre.

Nieve sourit. « Allez, Rose. Avec ou sans cheveux longs, on sera toujours différentes ! On est humaines. Petites, douces, avec de grands yeux ronds, un nez, des dents plates, pas de défenses ni de griffes et puis notre peau ! Désolée de te le dire, mais peu importe comment tu essaies de t'intégrer, on aura toujours l'air différentes des Ky'Tain... »

Rose haussa les épaules, abandonnant. « Peu importe. On manque de temps. Les invités vont arriver d'un moment à l'autre. »

« Oh là là ! Je sens vraiment mauvais. » Nieve pencha la tête et se renifla. « Wow. J'ai besoin de prendre une douche. Je ne peux pas leur servir à manger si je sens comme ça. Aide-moi avec ces draps. »

Akila

Le vaisseau du clan Darkiri avait atterri. Le chef, son fils et son commandant avaient été conduits à la demeure d'Akila. Le reste des Darkiri était resté dans et autour du vaisseau.

« Soyez les bienvenus chez moi, chef de clan Ma'cté, ainsi que vous, Commandant Ka'bté et Commandant Thar'n. Mes serviteurs ont préparé vos chambres pour que votre séjour soit des plus agréables. »

Les trois hommes inclinèrent légèrement la tête devant le chef de clan.

« Nous vous remercions de votre accueil, répondit le chef Ma'cté. Pardonnez notre arrivée précipitée, mais l'épouse de mon fils est sur le point d'accoucher. Nous ne souhaitons pas nous absenter trop longtemps. »

Akila acquiesça. Dans son clan, les pères n'assistaient généralement pas à la naissance de leurs enfants, mais il savait que certains le faisaient, surtout dans les clans plus belliqueux.

« Toutes mes félicitations pour ce nouveau membre de la famille, dit Akila. J'ai l'impression de n'entendre parler que de couples ayant du mal à concevoir. Chaque naissance est un trésor. Puis-je me permettre de vous demander combien d'enfants vous et votre épouse avez ? »

L'homme hocha fièrement la tête et laissa échapper un rire. « Vous le pouvez. Si l'accouchement se passe bien, nous aurons bientôt notre quatrième enfant. »

Akila en resta bouche bée. Quatre enfants ? Quand était la dernière fois qu'il avait entendu parler de quelqu'un avec quatre enfants ?

« Eh bien, j'espère sincèrement que tout se passera pour le mieux. Quatre enfants ! Vous êtes béni des dieux, si je puis dire. »

Ka'bté sourit, dévoilant des dents acérées. « Merci, chef de clan. Les Darkiri ont de quoi se réjouir. La plupart de nos hommes ont eu plusieurs enfants. »

Le vieux chef regarda ses invités avec étonnement. Il avait entendu des rumeurs sur leur facilité à procréer, certes, mais on sait bien que les on-dit sont souvent trompeurs. Pourtant, ceux-ci semblaient fondés. « J'espère alors que votre séjour ici sera également fructueux en naissances. »

Le chef Darkiri esquissa un sourire. « Je pense que certains de mes hommes seront certainement prêts à mettre la main à la pâte... »

Thar’n

Akila conduisit ses invités à leurs chambres. « Voici votre chambre, chef de clan. J'espère qu'elle sera à votre convenance. »

Pendant que les deux dirigeants échangeaient des politesses, Thar'n fut intrigué par une odeur particulière dans le couloir. Il tenta discrètement d'en découvrir l'origine.

Son chef entra dans sa chambre et ferma la porte. Les deux autres hommes suivirent Akila qui leur présentait leurs quartiers. La suivante était destinée à Ka'bté, et là encore, ils échangèrent des paroles courtoises.

L'odeur se faisait plus présente. Thar'n devait se retenir pour ne pas humer l'air à pleins poumons.

« Tout va bien, Commandant ? » Le vieux chef de clan observa Thar'n.

Le guerrier acquiesça. Il avait eu l'air distrait. « Veuillez m'excuser. J'avais la tête ailleurs un instant. »

Arrivé à ses appartements, Thar'n remercia son hôte comme l'avaient fait son chef et son co-commandant, puis entra. L'odeur y était bien plus intense. Un frisson lui parcourut l'échine. Il perçut un bruissement de draps venant de la chambre. Thar'n s'avança à pas feutrés vers la pièce.

Soudain, la porte s'ouvrit et une petite silhouette claire en émergea. Presque aussitôt, Thar'n réalisa que l'odeur envoûtante émanait de cette femme humaine.