La lumière vive blesse mes yeux lorsque je lève le regard vers le ciel azur, mais la chaleur du corps à mes côtés rend tout supportable.
Je caresse tendrement les cheveux sombres et soyeux qui effleurent mon bras. Des yeux d'un bleu éclatant plongent dans les miens.
Le murmure du vent dans les feuilles et l'herbe crée une ambiance paisible et agréable. Des rires joyeux et des sourires chaleureux rendent ce moment parfait.
Alors que je m'approche pour l'embrasser, tout autour de nous se met à trembler comme de l'eau. Les rires et les sourires s'évanouissent, remplacés par le son strident de mon réveil, interrompant un autre rêve que j'aurais voulu réel.
Je me réveille en sursaut et éteins l'alarme. Je marmonne quelques jurons, sors du lit et me dirige vers la salle de bain pour me préparer.
Après m'être brossé les dents et avoir enfilé mes vêtements de sport, je descends à la salle d'entraînement. Je dois encore m'infliger une séance éprouvante qui me laissera épuisé et courbaturé. Mais je n'ai pas le choix, en tant que leader, je dois montrer l'exemple.
En tant que second du MC de Jupiter, j'ai de lourdes responsabilités. Mon père occupait ce poste avant moi et il excellait dans ce rôle. Je dois être à la hauteur.
Après l'entraînement, je me rends à la cuisine pour prendre un café et manger un morceau. En franchissant les grandes portes, je manque de percuter une petite femme aux cheveux sombres.
Elle trébuche, mais je la rattrape avant qu'elle ne se cogne la tête contre le coin du comptoir.
Ses yeux d'un bleu vif me regardent, surpris et un peu effrayés. Je ne sais pas si c'est moi qui l'effraie ou si c'est sa chute évitée de justesse.
Mais je ne peux détacher mon regard du sien. Ce sont les mêmes yeux qui hantent mes rêves depuis cinq ans.
Ces yeux que je voudrais contempler sans cesse. Ces yeux que je voudrais voir en face de moi au bar. Ces yeux qui éveillent ma jalousie quand ils se posent sur d'autres hommes du club.
Je sais que je ne devrais pas avoir ces pensées. Je me l'étais interdit. Mais avec elle si proche, je ne peux m'empêcher de me demander « et si ». Et si nous pouvions être ensemble ? Et si je n'étais pas à la tête d'un club de motards et si elle n'était pas la sœur de mon ami ? Et si nous nous étions rencontrés plus tard, plus sûrs de nous ?
Quelqu'un s'éclaircit la gorge, brisant l'instant entre nous. Je l'aide à se redresser et recule. Je me tourne vers la personne qui nous a interrompus et vois ma mère, l'air amusé.
Je regarde à nouveau la femme à côté de moi. Ses joues sont légèrement rosies. Je ne sais pas si je dois être amusé ou émerveillé que mes bras autour d'elle l'aient fait rougir.
« Bonjour, Jackson. Comment s'est passé ton entraînement ? » demande ma mère.
Je me tourne vers elle, la seule personne autorisée à m'appeler par mon vrai prénom. Je réponds : « Bonjour, Maman. C'était bien, comme d'habitude. Comment s'est passée votre matinée ? »
Ma mère reste là, l'air amusé, regardant alternativement entre moi et la femme à côté de moi qui se tient immobile.
« J'ai passé une bonne matinée. Clarissa m'a aidée à préparer le petit-déjeuner puisqu'elle n'a pas le droit de s'entraîner cette semaine. Ils disent que c'est trop « violent » pour elle et qu'elle pourrait se blesser. Qu'en penses-tu ? »
Ma mère hausse un sourcil, l'air contrarié. Je sais qu'elle est agacée, mais je ne peux rien y changer.
Je soupire et me dirige vers la cafetière. J'ai besoin d'un café si nous allons avoir cette conversation. « Vous savez que je ne suis pas responsable de ça. Son frère a pris cette décision car il est responsable d'elle. Le patron est d'accord parce qu'il considère Clarissa comme une sœur, tout comme beaucoup d'autres hommes du club. »
Ma mère me lance un regard furieux.
« Jackson Jeffries, comment peux-tu laisser une jeune femme être mise à l'écart parce qu'elle est une femme ? Ce n'est pas acceptable. Ce n'est pas ainsi que je t'ai élevé ! »
Mince alors. Qu'attend-elle de moi ? J'évite déjà de parler à Clarissa autant que possible, et maintenant elle veut que je dise aux hommes, y compris au frère de Clarissa, qu'elle devrait être autorisée à se battre avec nous ?
« Maman, je... »
« Ce n'est pas grave, Holly, vraiment. Ça ne me dérange pas. Je préfère passer la matinée ici avec vous, à cuisiner. Ne dérangez pas Ghost pour ça. Vraiment, tout va bien. »
Cette voix... Elle me fait toujours l'effet d'une déesse qui s'adresserait à nous. Sa voix douce incite tout le monde à lui obéir.
Je l'ai ressenti la première fois qu'elle m'a parlé. Elle avait quinze ans et venait d'arriver au club avec son frère. Je n'avais que dix-huit ans, et j'ai su à ce moment-là que je ferais n'importe quoi pour elle.
Puis elle est partie étudier, et j'ai essayé de l'oublier. Je n'avais pas besoin d'avoir des sentiments pour la sœur de mon ami.
Mais trois ans plus tard, elle est revenue après avoir terminé le lycée. Elle est entrée, et il m'a semblé que tout le monde s'était tu.
Ses yeux ont croisé les miens à travers la pièce, et je n'oublierai jamais la façon dont elle m'a regardé.
C'est le même regard que je vois dans mes rêves. Le regard que je ne peux m'empêcher de revoir.
La raison pour laquelle je ne peux pas m'approcher d'elle.
C'était un regard de désir. D'envie. Et je sais que je l'ai regardée de la même façon.
Ma mère émet un son et adresse un sourire triste à Clarissa avant de retourner à ce qu'elle faisait avant mon arrivée.
Sans regarder Clarissa, je prends mon petit-déjeuner et me dirige vers la salle à manger. J'évite de parler à Clarissa, ce qui est une règle importante que je m'impose.
Je ne me laisserai pas entraîner davantage dans son monde. Du moins, c'est ce que je me dis.
