« La meilleure soirée de tous les temps ! » s'exclame Sky en virevoltant sur la piste de danse, bousculant les gens sans s'en soucier. Elle bouge à toute allure, mais elle tient fermement ma main, gardant son équilibre malgré ses mouvements frénétiques.
Son comportement est complètement débridé, mais ce soir, ça ne me dérange pas. La musique est lente, pourtant Sky danse dessus d'une façon que je ne comprends pas. Je la suis, un sourire aux lèvres en l'observant.
Il me faut un moment pour arrêter de remarquer les regards en coin des gens avant de me mettre à danser aussi. Pendant un court instant, j'oublie mon audition du lendemain, mes soucis, et même l'invitation cachée dans mon soutien-gorge.
Cette fête n'est peut-être pas aussi palpitante que ce qui se passe à l'étage, mais c'est différent de mes habitudes. Je me laisse emporter par la danse de Sky, comme si nous étions sœurs depuis toujours. Certaines personnes semblent agacées alors que nous nous frayons un chemin dans la foule, mais la bonne humeur de Sky est contagieuse.
Soudain, Sky nous arrête, ce qui tombe à pic car ma tête tourne à force de danser. Elle attrape deux verres d'un serveur qui passe. Je regarde à nouveau le serveur, songeant à lui demander des nouvelles de Carter.
Je n'ai pas parlé de cette fête à Carter.
— Bois, dit Sky en me tendant un verre et me faisant détourner le regard du serveur. J'examine le liquide transparent. Ça ne ressemble pas à du vin, je suppose que c'est un cocktail chic pour les gens fortunés.
Je hume le verre et une odeur sucrée s'en dégage, comme un mélange de différents fruits rouges.
— Allez, bois, Lay, insiste Sky en faisant tinter son verre contre le mien jusqu'à ce que je prenne une gorgée. Le goût est aussi sucré que l'odeur, et il glisse doucement dans ma gorge. Je sens que ce serait facile de se laisser griser avec ça, d'autant plus que j'en veux déjà plus, malgré une légère amertume.
Sky prend mon verre vide et le pose sur le plateau d'un serveur qui passe. Quand elle se retourne vers moi, elle semble ailleurs, regardant la foule derrière moi.
— Je pense que je vais chercher d'autres personnes avec qui danser, dit Sky, l'air distrait. Toi, va explorer un peu. On ne sait jamais sur qui on peut tomber ici.
Avant que je puisse dire quoi que ce soit, un homme en costume sombre l'entraîne. Je me retrouve seule au milieu de la foule, commençant à sentir mes doigts à nouveau alors que je réalise que Sky m'a laissée en plan.
Rapidement, la foule se referme autour d'elle et je ne la vois plus. Je me fraye un chemin, sachant que je ne la retrouverai probablement pas. Elle fait ça exprès. C'est sa façon étrange de me pousser à aller vers les gens.
Pourquoi s'intéresse-t-elle tant à ma vie amoureuse ? Ce n'est pas parce qu'elle est mariée qu'elle peut essayer de régenter la mienne.
— Excusez-moi, dis-je doucement en me faufilant entre un groupe d'hommes qui discutent de choses sans importance au milieu de la piste de danse. Les gens essaient de danser ici.
Je décide de ne pas monter au-dessus du premier étage. Me faire mettre à la porte devant tout le monde serait très gênant et pourrait nuire à mes chances pour mon audition demain. Alors, je me dirige vers le buffet, espérant trouver Carter. Sans Sky.
À quoi bon avoir une sœur si elle vous abandonne au milieu d'une fête ?
Le buffet est sur le côté, et étonnamment, il n'y a pas foule. La nappe est d'un doré éclatant, assortie aux tentures luxueuses qui décorent la salle de bal, le tout baigné d'une lumière douce et tamisée. Je me demande un instant combien cette fête a pu coûter.
Je prends un autre verre de ce cocktail transparent et en bois une gorgée, scrutant la salle à la recherche de Carter, mon ami blond qui est censé travailler ici.
— Tu l'as vu ? j'entends une fille chuchoter à proximité.
Essayant de ne pas être trop évidente, je tourne la tête pour écouter. Je ne sais pas de quoi elles parlent, mais ça me fait me sentir moins seule. Pour avoir l'air moins gênée, je prends une petite pâtisserie sur la table et la mange lentement.
— Évidemment que non, répond une autre fille, son accent épais de la meute du Désir facile à reconnaître.
Je me retourne lentement, faisant semblant de regarder la fête par-dessus leurs épaules. La première fille n'a pas l'air d'être d'ici. Ses cheveux sont très blonds, et ses boucles sont trop volumineuses pour être de cette meute.
Même si elle a l'air perdue en scrutant la foule, elle est très jolie, ses yeux verts s'accordant parfaitement à sa robe. L'autre fille est clairement de cette meute. Ses cheveux noirs et raides et ses yeux bruns en amande le montrent. Sa robe est moulante et simple, me faisant sentir que j'en fais trop.
— Il est probablement à l'étage, entouré de jolies filles, dit la blonde d'un ton agacé en s'appuyant contre la table.
— Tu sais que ce n'est pas sa première fête en tant qu'Alpha, dit l'autre fille en rejetant ses cheveux en arrière. Personne ne le voit vraiment, à moins de mentir. Je pense qu'il va dans une autre meute et laisse tout le monde mettre sa maison sens dessus dessous.
Je fronce les sourcils. Elles parlent d'Asher.
— On ne peut pas venir ici et ne jamais le voir !
— Il ne veut pas être dérangé par des gens ordinaires comme nous, Morgan.
Morgan, la blonde, semble contrariée par cette remarque. Elle prend un verre comme le mien et le boit d'un trait, puis un autre. Elle essuie un peu de son rouge à lèvres rose, s'appuyant contre la table comme si c'était un fauteuil confortable.
— J'ai toujours rêvé de le voir. On dit que ses yeux sont si dorés qu'ils ressemblent à des bijoux, dit Morgan.
— C'est un peu exagéré...
— Non, je te jure ! dit Morgan avec force, se tournant vers son amie qui affiche un sourire dubitatif. Je te le prouverai si tu m'aides à le trouver.
Morgan me rappelle Sky. Où est passée cette sœur qui m'a abandonnée ? J'espère qu'elle n'est pas en train de trahir ses vœux de mariage avec un bel homme de la meute du Désir.
— Tu te tairas si je fais ça ?
— Oui...
La fille se lève et prend la main de Morgan, l'entraînant dans la foule de danseurs, et je ne les vois plus. Je pousse un profond soupir, regardant en direction des toilettes. Je commence à marcher vers elles.
Les toilettes valent probablement plus que toute ma maison. De grands cristaux entourent les miroirs, projetant de douces couleurs arc-en-ciel sur les cabines. Le bruit de mes talons sur le sol en marbre est presque musical, la surface presque aussi brillante qu'un miroir.
J'envisage de me cacher ici, où il fait calme et frais, loin des cocktails forts. Je me tiens devant le miroir, sortant l'invitation de mon soutien-gorge et la retournant.
~A
Je caresse les mots du bout des doigts. Que cela peut-il signifier ? Mon esprit échafaude une explication farfelue que j'essaie d'ignorer. Asher aurait-il pu écrire ceci ? Pourquoi voudrait-il me rencontrer ? Il ne sait probablement même pas que j'existe.
La porte des toilettes s'ouvre et je remets rapidement l'invitation dans mon soutien-gorge.
Une fille dans une jolie robe violette entre en titubant, son rouge à lèvres étalé. Elle a manifestement embrassé quelqu'un à la fête. Quand elle me regarde, je baisse rapidement les yeux, faisant semblant de me laver les mains.
Dès qu'elle entre dans une cabine, je me précipite vers la porte, la poussant pour sortir.
Mais je ne me retrouve pas dans la salle de bal.
J'expire lentement, pénétrant dans un couloir étroit. La moquette est d'un rouge profond et sensuel, mes talons s'y enfonçant. Le couloir étrangement froid me semble inconnu.
Suis-je sortie par la mauvaise porte ?
Je me retourne, ouvrant la porte que je viens de franchir. Au lieu des toilettes luxueuses où j'étais à l'instant, c'est un petit placard poussiéreux rempli de produits d'entretien.
Je referme lentement la porte, secouant la tête. Il devait y avoir quelque chose d'étrange dans ce cocktail.
Alors que je m'avance dans le couloir, je ne quitte pas des yeux la porte au bout, sur le mur de gauche. Les tableaux sur le mur semblent me fixer, les yeux froids de personnages sans visage me mettant mal à l'aise.
Je n'attends pas pour ouvrir la porte, me précipitant presque dans la pièce pour échapper à ce couloir inquiétant.
La pièce est banale. La seule chose à voir sont des murs sans fenêtres peints d'une couleur blanc cassé ennuyeuse.
Non merci.
Je fais demi-tour, ouvrant la porte. Encore une fois, un autre placard à produits d'entretien.
— Que se passe-t-il ? je demande à la pièce vide. Ces cocktails devaient contenir quelque chose qui me fait halluciner.
Puis j'entends quelqu'un s'éclaircir la gorge derrière moi.
— Perdue ?
Je sursaute, me retournant brusquement. Soudain, l'invitation lisse est dans ma main, la note manuscrite face à moi.
— Je vois que tu as reçu mon mot.
