Oui, Mr Knight

JAMIE

Après un déjeuner de rattrapage de quarante-cinq minutes avec Ethan, j'ai marché dans la rue froide en direction de Knight & Fils.

Le mois de décembre était absolument glacial, à tel point que je me suis couverte de la tête aux pieds.

Je tenais mon téléphone contre mon oreille, en train de discuter avec ma mère. Elle faisait son truc habituel, essayer de m'arranger un rendez-vous.

Je détestais vraiment quand elle faisait ça, mais cette femme avait pour mission de me marier avant d'atteindre la trentaine.

« Je ne sais pas... Je ne suis pas fan à l'idée de sortir avec un homme que je n'ai jamais vu auparavant, maman. Et, si je n'aimais pas à quoi il ressemble ? »

Je ne voulais pas paraître superficielle, mais j'allais avoir besoin d'encouragements si elle voulait que j'accepte.

Maman a soupiré en guise de protestation.

« Ryan est très beau, et je pense qu'il te plaira. Il semble très impatient de te rencontrer, Jamie. »

J'ai aperçu Mason Knight alors que je m'approchais de la porte du bureau, ses bras enlaçant une autre blonde, ses mains serrant ses fesses sur une mini robe noire moulante.

Elle lui chuchotait à l'oreille et d'après son regard, c'était quelque chose de plutôt osé.

Il est vraiment pire qu'une pute !

Mason a jeté un coup d'œil dans ma direction lorsque j'ai ouvert la porte du bâtiment avant de reporter son attention sur la blonde.

Il ne s'inquiétait pas d'avoir l'air inapproprié devant le personnel, pourquoi le ferait-il, alors qu'il en avait déjà baisé la moitié ?

« Jamie-Jamie, tu es là ? »

« Excuse-moi, maman, j'étais distraite. Que disais-tu ? »

J'ai appuyé sans arrêt sur le bouton pour que l'ascenseur descende. C'était calme à la réception, ça changeait par rapport à la ruée habituelle.

« Je demandais juste, est-ce que tu donnerais une chance à Ryan ? Un rendez-vous ? Je peux t'envoyer une photo de lui pour que tu puisses voir par toi-même. »

Oh, abandonne, Jamie. Tu sais qu'elle ne le fera pas.

J'ai soupiré en appuyant à nouveau sur le bouton de l'ascenseur.

« Très bien. J'irai à ce rendez-vous. Mais, je te jure, maman, que si ce type est bizarre, je pars. »

J'ai entendu un rire à côté de moi et j'ai regardé.

Merde.

Le corps musclé de Mason Knight se tenait juste à côté de moi, regardant les portes de l'ascenseur avec un énorme sourire en coin. J'ai supposé qu'il avait entendu ma conversation.

« Je dois y aller, maman. Je te rappelle. »

J'ai raccroché alors qu'elle était encore en train de discuter. J'ai remis mon téléphone dans mon sac et j'ai regardé vers les portes de l'ascenseur, souhaitant qu'elles s'ouvrent pour ne pas avoir à rester à côté de lui dans un silence gênant.

« Donc votre mère vous arrange un rendez-vous. C'est un peu bizarre. Vous ne pouvez pas trouver un rendez-vous par vous-même ? »

M. Knight a tourné la tête dans ma direction, attendant une réponse.

Je me mordais la langue. J'avais envie de lui dire de garder ses opinions et ses commentaires grossiers pour lui.

« C'est un rendez-vous à l'aveugle. Je vais juste faire de l'humour. Ça vaut le coup qu'elle ne me parle pas de ma vie amoureuse. »

« Ou votre absence de vie amoureuse. »

Il a ri à nouveau.

« Je suppose que tu vous ne faites pas beaucoup de rencontres. Un conseil : portez quelque chose d'un peu décolleté et essaiez de ne pas trop parler. Un homme n'est intéressé que par l'apparence, après tout. »

Bien sûr qu'il dit ça. Il se fiche qu'une femme soit sensible et douce, du moment qu'elle est assez chaude pour être baisée.

Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent. Personne n'était à l'intérieur, personne n'attendait pour monter à part nous.

Juste moi et M. Knight pour monter 48 étages, seuls.

Quelles étaient les chances ?

« Vous venez ou quoi ? » M. Knight a tenu la porte ouverte. « Je vous conseille de monter. Sauf si vous voulez rester tard, encore. »

« Oui. Merci. »

Je pensais que je préférerais un espace confiné avec lui pour quelques minutes que de rester tard encore une fois.

Je suis entrée et je me suis mise à côté de lui. Mason a appuyé sur le bouton du quarante-huitième étage et nous sommes montés.

« J'ai besoin que vous organisiez cette réunion avec M. Henderson dans le courant de la semaine. »

Il tapotait légèrement son écran.

« Assurez-vous que c'est à Bradford. Et assurez-vous que ce ne soit pas trop tard. »

« Oui, M. Knight. » Je faisais de mon mieux pour être professionnelle et polie.

Tout à coup, l'ascenseur s'est arrêté en tremblant, ce qui m'a donné un haut le cœur.

Les portes ne se sont pas ouvertes. Il était clair qu'il ne s'arrêtait pas à un autre étage.

Ce n'est pas possible, putain !

« Putain de merde » a juré M. Knight, en appuyant sur les boutons encore et encore. « Je n'arrive pas à croire que ça arrive. »

J'ai soupiré. « Nous sommes coincés. »

Il a levé les yeux. « Ne dites plus rien. De tous les ascenseurs du bâtiment, c'est dans celui-ci qu'on est entrés. J'ai une réunion dans la salle de conférence à deux heures. »

Il a jeté un coup d'œil à sa montre coûteuse et a lâché un soupir de frustration.

Si on ne sort pas d'ici en huit minutes, ce que j'espère vraiment, il n'arrivera pas à temps à cette réunion.

L'idée de côtoyer ce connard pendant quelques minutes au maximum était déjà assez pénible. Maintenant, il semblait que ça allait être beaucoup plus long que ça.

C'est alors que l'interphone d'urgence s'est déclenché.

« Bonjour, vous parlez avec Adam de la sécurité. Nous avons été alertés qu'il y a un problème avec l'ascenseur dans lequel vous êtes. Si vous pouviez rester assis, les secours sont en chemin. »

Mason a appuyé sur le bouton du haut-parleur.

« De combien de temps d'attente parlons-nous ici ? » demanda-t-il d'un ton sec.

« Nous envisageons environ quarante-cinq minutes à une heure d'attente, mais avec un peu de chance, nous pourrons vous dépanner bien plus tôt que ça. Restez assis et essayez de rester calme. »

Rester calme.

Facile à dire pour Adam alors qu'il n'était pas coincé ici avec Mason Knight.

M. Knight s'est retourné, agité.

« On dirait que nous sommes coincés, Jamie. »

J'avais envie de lever les yeux au ciel comme il l'avait fait avec moi. Mais, bien sûr, je ne pouvais pas.

« Je suppose que oui. »

J'espère que l'ascenseur va bientôt démarrer. Je préférerais littéralement être pris avec quelqu'un d'autre.

***

45 minutes plus tard, nous étions toujours coincés dans cet espace confiné, l'ascenseur de l'enfer.

J'avais chaud, aussi. J'avais enlevé mes vêtements, juste les couches extérieures.

J'essayais de tenir le plus longtemps possible sans ôter le reste, jusqu'à ce que je n'arrive plus à supporter la chaleur.

Je ne voulais pas transpirer en face de lui !

J'étais appuyée contre le mur, tournée sur le côté pour ne pas être face à lui.

Je ne voulais pas paraître impolie, je me disais simplement que ce serait gênant si nous nous faisions face en silence.

« Je ne vous ai jamais vu porter ça avant. »

M. Knight a désigné la paire de lunettes que je portais. Des lunettes à monture noire que je portais pour lire, ce que je faisais actuellement pour passer le temps.

« J'essaie de ne pas le faire. Elles ne servent qu'à lire. »

J'ai baissé les yeux sur mon roman. Je ne lisais même pas, je faisais juste semblant.

« Vous ne les aimez pas ? » Il s'est rapproché, envahissant mon espace avec son odeur.

Même si je n'appréciais pas cet homme, il sentait plutôt bon... voire très bon.

J'ai de nouveau levé les yeux de ma page et j’ai haussé les épaules.

« Eh bien, elles ne sont pas vraiment jolies. »

Je n'arrive pas à croire qu'il essaie de faire la conversation.

« Qu'est-ce que vous lisez ? »

Au lieu d'attendre une réponse, il m'a pris le livre des mains et l'a retourné pour regarder la couverture.

« Une histoire d'amour. Hum. Pourquoi je ne suis pas surpris. »

J'ai froncé les sourcils.

« Effectivement, je lis des romances. Je pense que c'est le cas de beaucoup de gens. »

J'aimerais pouvoir lui dire de s'occuper de ses affaires et de se fourrer ses opinions dans son cul chauvin.

M. Knight a ri.

« Quand allez-vous vous réveiller et réaliser que la vie n'est pas un conte de fées ? »

Il m'a tendu mon livre.

« Le bonheur pour toujours n'existe pas, Jamie. »

Je levais les yeux vers lui, voyant à quel point ses yeux étaient sombres maintenant qu'il était si proche. Le plus proche que j'aie jamais été de lui.

« C'est votre opinion, je suppose. J'ai le droit d'avoir la mienne, tout comme vous. »

L'ascenseur a subi une secousse soudaine, puis s'est mis en mouvement, gravissant les étages du bâtiment et nous rapprochant de plus en plus du quarante-huit.

De plus en plus près de la liberté.

« On devrait prendre nos affaires », ai-je dit, et il s'est écarté de mon chemin.

On a pris nos vestes et nous sommes restés près des portes, en attendant qu'elles s'ouvrent.

Coincé dans un ascenseur avec un homme qui me déteste. Ça n'arriverait qu'à moi.

Carmen va être morte de rire quand je vais lui dire.

Alors que nous arrivions à notre étage, M. Knight tourna la tête dans ma direction.

« Vous avez tort pour les lunettes. Elles ne sont pas inintéressantes. »

Les portes se sont ouvertes et il est sorti, me laissant dans la confusion.

***

Après une matinée mouvementée de frustration avec le grand méchant patron, j'ai passé le reste de la journée enterré dans mon travail.

Il était 6 heures passées avant que je ne quitte l'écran des yeux et que je réalise que les gens avaient déjà commencé à partir.

Je ferais mieux d'y aller aussi.

J'emballais mes affaires et rangeais mon bureau quand j'ai vaguement entendu une conversation dans le bureau de M. Knight.

Entre lui et Jen.

« Allez, Mason, tu sais que je peux te donner tout ce que tu veux chez moi. »

« Une fois et une seule. Tu te souviens de ce que je t'ai dit ? » Ses mots sont sortis durs. « Et tu m'as dit que tu étais d'accord avec ça. »

« Je pensais juste… »

« Je sais ce que tu pensais. Tu pensais que tu pouvais me changer. Tout le monde pense ça. Eh bien, je suis qui je suis, et je ne peux pas être changé ! »

« Très bien, alors. Mais, tu sais où je serai si tu changes d'avis. »

La porte s'est ouverte et Jen est sortie avec une mine renfrognée, une mine renfrognée que j'étais sûr qu'elle ne lui avait pas montrée.

Je me suis sentie désolée pour elle, un peu. Elle devait savoir dans quoi elle s'engageait.

J'ai secoué la tête.

Mon téléphone a vibré sur mon bureau. Je l'ai décroché et j'ai vu que c'était un texto de maman.

Quand j'ai ouvert le message, j'ai été heureuse de voir la photo d'un très bel homme sur mon écran.

Cette femme travaille vite !

Maman avait raison. Ryan avait l'air robuste, exactement ce que j'aimais chez un homme.

« Ce n'est pas le gars avec qui vous avez un rendez-vous ? » La voix de M. Knight a retenti derrière moi.

Je me suis retournée et j'ai vu qu'il avait regardé par-dessus mon épaule.

« Pourquoi cette question ? »

Il a froncé les sourcils. « C'est juste que... ce n'est pas le genre de gars avec qui je vous imaginais. »

« Eh bien, je pourrais m'imaginer avec lui. » J'ai mis le reste de mes affaires dans mon sac en vitesse. « Vous avez besoin d'autre chose ? Ou est-ce que je peux y aller ? »

« Vous pouvez partir. Je vous verrai demain. »

Il a mis ses mains dans les poches de son pantalon et s'est dirigé vers son bureau pour une autre longue nuit.

Qu'est-ce qu'il a ?

La semaine dernière, il avait pété les plombs et menacé mon emploi.

Mais, depuis l'ascenseur défectueux, il semblait penser qu'il pouvait donner son avis sur ma vie.

J'emmerde ce connard.