"Prince Alpha, Roi ou Luna, je vais te frapper si fort que tu devras manger à la paille pendant au moins plusieurs heures avant de guérir." La voix de Lucy me parvient à travers mon inconscience.
Un grognement profond et menaçant me fait ouvrir les yeux.
Lucy se tient devant Roman, tandis que son compagnon la retient.
Roman lui grogne dessus, une veine apparaissant sur son front.
C'est probablement un mauvais moment pour rire, mais cela ne m'arrête pas.
Les trois têtes se tournent vers moi.
Roman avec toujours une expression de colère sur son visage, Lucy qui a l'air en colère et triste à la fois, tandis que son compagnon est étonnamment pâle pour quelqu'un avec son teint de peau.
Sa vue me fait rire encore plus fort.
Bientôt, je me tiens le ventre tandis que des larmes roulent sur mon visage.
Lucy s'approche de moi et me gifle.
Mon rire s'arrête immédiatement tandis que je la regarde, choquée.
Le grognement menaçant de Roman se fait entendre une fois de plus.
"Oh ferme-la, grand méchant loup-garou." Lucy se moque de Roman avant de se tourner vers moi.
"Je suis vraiment désolée. Il était si rapide et avant même que je réalise ce qu'il faisait, il t'avait déjà marquée. Je suis vraiment désolée, Kat." Ma main trouve la petite blessure sur mon épaule. Je suis presque sûre qu'à présent, je suis aussi pâle qu'Eric.
"TU M'AS MARQUÉE SANS MON CONSENTEMENT ?!" Roman hausse les épaules, semblant presque s'ennuyer. La colère s'empare de moi alors que je sens mes mains s'enflammer sous l'effet de ma magie.
"ESPÈCE DE DANGEREUX FILS DE..."
La porte s'ouvre avec fracas, révélant ma mère très en colère. Je ferme instantanément la bouche. La surprise estompe ma magie aussi vite qu'elle est venue.
"Lucy, Eric, dehors." Ma mère ne cille même pas en me fixant.
Lucy me donne une bise rapide sur le front et court après son compagnon qui sort de la pièce en courant.
"Katelynn Anne-Marie Moon...", commence ma mère dès que tout le monde est sorti. Je me tasse dans le lit en me sentant comme une enfant de six ans, grondée pour avoir volé des biscuits.
"Nous en avons parlé depuis de nombreuses années. Tu dois être polie, compris, jeune fille ?" Des larmes menacent de sortir de mes yeux maintenant, tandis que je regarde ma mère avec une moue.
"Maman, il m'a marquée pendant que j'étais évanouie. Il n'a même pas demandé." Je sais que j'ai l'air pathétique, mais je me sens violée en quelque sorte.
La mine renfrognée de ma mère n'est plus sur moi mais sur Roman, qui bouge légèrement et inconfortablement sur ses pieds.
"Tu as marqué ma fille sans son consentement ?" Ses mots sont calmes, mais des années d'expérience me disent que ma mère est tout sauf calme.
"C'est la dernière fois que tu fais quelque chose sans le consentement de ma fille. Même un Prince Alpha doit pouvoir se justifier devant le Conseil. Ton père est un ami cher depuis de nombreuses années, ne m'oblige pas à l'appeler."
Roman fixe maintenant le sol, se sentant sans doute lui aussi comme un enfant de six ans. Il hoche légèrement la tête, ayant probablement peur que ce qu'il dise ne soit pas assez bien. Un homme intelligent.
"Katelynn, prends une douche et prépare tes affaires. Je suis sûre que le Prince Alpha doit être rapidement de retour aux côtés de son père. Je dois aller voir nos invités, mais nous dînerons ensemble avant ton départ."
Sur ces mots, ma mère ouvre la porte et la désigne du doigt.
Roman sort devant elle, la tête toujours baissée.
Si mon cœur n'était pas au bord de la rupture, j'aurais probablement ri.
Je me sens comme une grosse merde.
L'Italie.
Je vais devoir aller jusque là-bas. Je devrai laisser tout le monde derrière moi.
Je me lève rapidement et vais sous la douche, où je pleure à chaudes larmes.
Après avoir terminé, je me promets que c'est la dernière fois que je pleure.
Je me contente d'un simple jean à l'aspect délavé, d'un débardeur et d'une veste en cuir.
En attachant mes cheveux en une queue de cheval haute, je me regarde dans le miroir.
Je prends quelques profondes respirations.
Je ne pleurerai pas, je ne serai pas faible et je suis sûre que je serai toujours une guerrière.
Je souris devant ma force avant d'attraper mon téléphone et de me rendre en bas.
L'odeur de la nourriture me parvient et je réalise soudain que je suis affamée.
Lorsque j'entre dans la salle à manger, je vois mon père déjà assis avec ma mère à côté de lui.
Je leur souris à tous les deux.
Je prends place et bientôt Lucy entre en riant avec Eric qui marche à côté d'elle.
Ils ont l'air heureux, je suis heureuse pour eux.
Quand elle me voit, son visage heureux est immédiatement remplacé par un visage inquiet.
Elle s'assied à côté de moi et tient ma main dans la sienne.
"Eric vient d'Espagne. Nous ne serons donc pas si loin que ça. Il a un jet privé et je suis sûre que le Prince Alpha en a un aussi."
Je n'ai jamais entendu quelqu'un prononcer les mots "Prince Alpha" avec autant de dégoût.
"On s’appellera tous les jours ! Assure-toi de voler un chargeur car je ne sais pas s'ils ont les mêmes que nous. Je t’appellerai par vidéo et n'hésite pas à me dire si Monsieur Je-Sais-Tout fait le con parce que je me ferai un plaisir de te kidnapper."
La dernière partie me fait grimacer et je l'enlace rapidement.
Son odeur me parvient avant même que je puisse le voir.
Je dois admettre qu'il est très beau.
Il porte un costume bleu foncé, avec une cravate noire.
Je peux voir ses muscles se contracter sous les vêtements lorsqu'il s'avance pour se servir de l'eau.
Lorsque nos regards se croisent, je ne peux m'empêcher de penser qu'il me regarde comme s'il avait honte.
Je ne le connais pas assez bien, mais ce mot me vient quand même à l'esprit. C'est probablement à cause de notre lien.
Il s'éclaircit la gorge, tout le monde dans la pièce lui accordant désormais toute son attention.
"D'abord, je dois présenter mes excuses sincères à ma Dame." Ses yeux brûlants sont sur les miens. Je ne réagis pas pour autant, toute mon énergie est consacrée à garder un visage impassible.
"J'ai été presque merveilleusement...", son regard se tourne vers Lucy, "...reçu ici. Je m'assurerai que mon père sache à quel point l’hospitalité de cette meute est formidable."
Sur ces derniers mots, il sourit gentiment à ma mère.
Elle sourit en retour, mais je peux voir qu'elle est toujours en colère contre lui.
Cependant, étant une bonne luna, elle ne le lui montre pas.
C'est en partie la raison pour laquelle je ne lutte pas contre le fait d’aller avec lui.
Si je le fais, nous devrions aller devant le Conseil, ce qui pourrait avoir un mauvais impact sur la meute.
Cette meute sera toujours ma famille et je ne leur ferai jamais de mal.
"Maintenant, allons manger !" dit ma mère en riant.
Pendant le dîner, j'apprends des choses sur Eric.
C’est un bêta et il a deux frères qui ne lui ressemblent en rien.
Il aime lire, tout comme Lucy, et bientôt ils discutent de statistiques ou de quelque chose de ce genre.
Je souris à leur interaction. Le compagnon de Lucy correspond à tout ce qu'elle a toujours voulu.
Combien de soirées pyjamas nous avons passées où elle a décrit sa vie avec son compagnon.
Je me souviens qu'un soir, je lui ai dit que j'espérais que son compagnon soit un guerrier pour qu'il puisse la protéger quand je ne serais pas là.
Être un bêta devrait faire l'affaire. L'entraînement des bêtas consiste aussi en beaucoup de techniques de combat.
Je suis sûre qu'Eric sera capable de la protéger.
Quelque chose tombe sur mon assiette, attirant mon attention.
Roman vient de faire tomber un morceau de son steak dans mon assiette.
Mon père et ma mère arrêtent de parler et le regardent attentivement.
Pour quelqu'un d'aussi haut placé, partager sa nourriture n'est pas une mince affaire.
"Mange. La nourriture en avion n'est pas aussi délicieuse que ça." Il me regarde intensément pendant qu'il prononce ces mots.
Je lui souris poliment et mange ce qu'il a posé devant moi.
Je le regarde entre mes cils et je vois qu'il a un immense sourire sur le visage.
Cela le rend presque adorable. Presque.
Je pose ma main sur la marque maintenant cicatrisée.
Je ne la sens pas, mais je sais qu'elle est là.
Roman voit mon geste et son sourire s’évanouit immédiatement.
"Fais tes adieux. Notre pilote nous attend. Il fait un signe de tête poli à mes parents avant de sortir.
Tout le monde dans la pièce est maintenant silencieux.
Je sens les larmes monter, mais je les refoule.
Je ne pleurerai pas, je ne pleurerai pas, je ne pleurerai pas.
Ma mère est la première à se lever et à mettre ses bras autour de moi si fort que je peux à peine respirer.
Elle me fait vaciller sur mes jambes et je la serre fort dans mes bras.
"Je suis fière de toi. N’abandonne pas tes rêves, à moins que tu le veuilles vraiment, ma chérie. Il est ton compagnon, mais tu es aussi sa compagne. Ne le laisse pas te prendre quoi que ce soit à nouveau", me chuchote-t-elle à l'oreille.
Ma mère se recule, prend mon visage dans ses mains et me couvre de baisers.
"Je t'aime, ma chérie. Donne de tes nouvelles." Ma mère recule pour laisser à mon père l'espace nécessaire pour venir vers moi. Dire que je suis surprise serait un euphémisme.
C'est une brève étreinte, mais quand je le regarde, je vois des larmes dans ses yeux.
"Tu feras une grande Reine Luna un jour. Féroce et forte, mais attentionnée et aimante. Tu me rends fier, ma fille." Ses mots me font presque pleurer, mais je me contente de lui faire un signe de tête.
"Merci, papa. C'est grâce à toi que je suis comme ça." Je vois une larme s'échapper de l’un de ses yeux, alors je me retourne rapidement pour faire face à Lucy.
Ses bras sont autour de mon cou avant même que je puisse bouger pour la serrer dans les miens.
Nos cœurs battent rapidement, synchronisés.
J'aime toute ma famille, mais Lucy a une place spéciale dans mon cœur.
Nous avons grandi côte à côte comme des sœurs.
Je l'ai soutenue lorsque sa mère est morte et elle s'est tenue à mes côtés chaque fois que je me suis battue pour être une guerrière.
"Rends-moi fière, rebelle." C'est tout ce qu'elle dit. Nous avons déjà fait nos aurevoirs et je sais que pour ne pas pleurer toutes les deux, nous devons nous arrêter là.
"Sois heureuse, bichette." Je lui souris en retour. Je fais un pas à côté d'elle et attire Eric vers moi.
"Tu dois la protéger maintenant. Je te laisse son cœur, sa vie et ma confiance. Garde-la en sécurité, rends-la heureuse. Sinon, que la Déesse t'emporte avant moi."
Je le relâche rapidement, recevant une tape sur le bras de la part de Lucy.
"Tu l'as menacé, n'est-ce pas ?" Je hausse les épaules et envoie des baisers au vent à tout le monde.
Je me retourne et me dirige vers la porte, sans jamais jeter un regard en arrière par-dessus mon épaule.
Je sais que si je le fais, je risque de ne plus partir, jamais.
Lorsque j'atteins le grand SUV, Marcel est debout derrière et met mes affaires dans le coffre.
Quand il me voit, il me sourit chaleureusement.
"Bonjour, petite sorcière. Reste une rebelle, toujours", c'est tout ce qu'il dit avec un clin d'œil avant de s'éloigner. La porte du siège passager est ouverte, alors j'y monte.
À ma grande surprise, c'est Roman qui conduit la voiture. Ses gardes ne sont pas là.
"Tu es prête ?" demande-t-il. Jamais, je pense. Mais j'acquiesce quand même. Italie, tu n’as qu’à bien te tenir.
