Draco est assis dans sa voiture, la vitre baissée et le siège incliné. Les yeux fermés, il réfléchit, la main en l'air. Il avait des sentiments contradictoires, toujours en conflit avec ce qu'il pensait être juste - alors que je suivais simplement les miens.
Mais les Rouges étaient bien différents des Argents. Les siens faisaient souvent des choses répréhensibles, mais quand ils se maîtrisaient, ils pouvaient être corrects.
« Salut, mon chou ! » Fiona s'arrête d'abord à sa fenêtre, marchant avec précaution sur le parking pavé du restaurant Gypsy Love. « Bon anniversaire ! »
Draco ouvre ses yeux rouges aux reflets bruns. Son regard révèle sa capacité à rester calme même dans le chaos. C'est ainsi qu'il décrivait la vie avec des criminels - chaotique.
Nous étions son havre de paix.
« Bon anniversaire, Draco. » Je me penche à la fenêtre à côté de Fiona et attrape sa cravate. J'examine le tissu spécial dont Fiona ne cessait de parler, un noir argenté. Je vois les paillettes. « Tu as raison, un magicien l'a fabriquée pour porter chance. Vraiment unique. »
Draco reste muet. Il est surpris. Je l'observe avec curiosité tandis qu'il fixe nos robes, ébahi.
« C'est pour quelle occasion ? » Draco sourit lentement. « Vous êtes toutes les deux magnifiques. » Il s'arrête là, peu doué pour complimenter les femmes.
Je recule, et Fiona tire sur sa portière, mais elle ne s'ouvre pas. « Doucement, Penny. Tu vas la casser. »
« Grr. » Fiona essaie d'avoir l'air fâchée.
Son nom complet était Fiona Penelope Moss.
C'est pourquoi Draco l'appelait parfois Penny. Elle prétendait détester ce surnom, mais Draco et moi savions qu'elle l'appréciait. Elle souriait toujours en l'entendant, avant de feindre la colère.
Draco remonte la vitre teintée et sort de sa voiture de sport, rayée et nécessitant de nouveaux pneus. Mais il les abîmerait aussitôt s'il en mettait des neufs. Il conduisait à toute allure. Sans s'arrêter.
Du moins, c'était l'impression qu'on avait, alors Fiona et moi n'aimions pas monter dans sa voiture. Mais marcher avec lui ? Ça, c'était sûr.
Je prends un bras et Draco passe l'autre autour de la taille de Fiona tandis que nous entrons ensemble dans le restaurant.
C'était en fait l'établissement le plus chic des Riverbeds. La cuisine y était excellente, et il était situé à l'écart de la ville principale. En bordure, près du Parc National.
Draco l'avait choisi, et nous l'aimions tous comme lieu d'évasion. Nous y venions régulièrement, une fois toutes les deux semaines comme tradition. Ou pour les anniversaires.
À l'intérieur, Fiona nous guide vers notre table préférée qu'elle a réservée, donnant sur une petite cour joliment éclairée.
Draco s'installe dans le box et je m'assieds en face tandis que Fiona me lance un regard envieux avant de choisir Draco.
Elle prend place à côté de lui.
Draco sourit gentiment à sa serveuse préférée - qui servait son client favori.
« Comme d'habitude ? » demande Diane à nous tous. J'acquiesce, Fiona hoche la tête, et Draco marque une pause.
« En fait, ajoutez la montagne cette fois. On va tous partager. » Il se lèche les lèvres rien que d'y penser.
Diane acquiesce, se retourne et s'éloigne en se déhanchant, mais Draco regarde immédiatement vers nous pour voir si nous sommes d'accord.
« Vous avez toujours voulu l'essayer, dix boules, tous les parfums », dit-il. « Ce soir, c'est le moment - on se lance. »
« Mince alors, Draco. Ça va fondre et en mettre partout », dit Fiona. « Sur nos nouveaux vêtements en plus. »
Elle avait raison. C'était vraiment dix grosses boules, empilées les unes sur les autres, dans un seul cornet. Mais...
« Léchez vite avant que ça fonde. On va le faire ensemble. » Je tapote des doigts, mal à l'aise avec cette idée. « Mais je veux le parfum bubble-gum bleu. Personne d'autre ne peut l'avoir. » Je les regarde tous les deux, voulant ce parfum pour moi seule. « D'accord ? »
« C'est mon anniversaire, je lèche tout. » Draco se penche en arrière et je regarde Fiona et Draco faire leur numéro mignon. Il lève sa jambe et elle s'appuie contre lui, tenant sa main et regardant ses nombreuses bagues alors qu'elle se repose sur lui, et il a l'air d'un roi.
C'était étrange pour tout le monde de voir à quel point nous étions proches, mais pas pour nous.
« Tu es si tendu », murmure Fiona en jouant avec ses bagues. « Tu t'es battu aujourd'hui, Draco ? »
« Je ne veux pas en parler », dit Draco d'une voix basse et me regarde. « Et toi ? »
« Comment tu le sais ? » je demande, perplexe.
« Je ne cesse de mettre en colère les mauvaises personnes », dit doucement Draco, les yeux emplis de colère. « Et j'avais peur qu'ils te fassent du mal. Tu les as tués, Evermore ? »
« Pas encore », je dis doucement et Draco parvient à esquisser un petit sourire, tandis que Fiona me lance un regard noir.
« Tu es obligée de jouer avec eux ? » demande Fiona. « Je ne prends pas leur parti, mais tu es méchante parfois... Pourquoi tu ne peux pas simplement me laisser te protéger ? Et tu n'aurais plus jamais à te battre », dit-elle doucement mais de façon protectrice. Elle était toujours protectrice.
« J'ai le droit de me défendre, ma puce », j'explique. « Je ne veux pas le faire. Je suis juste douée pour ça. »
Draco comprend. Il hoche simplement la tête en signe d'accord.
Notre petite amie magique était plus normale que monstre, contrairement à nous - qui avions du feu et de la glace à l'intérieur. Mais même ainsi, Fiona était toujours très forte. Elle était la plus gentille - et la plus féroce... pour les petites choses, en tout cas.
« Tu vas enfin nous en parler, Draco », demande Fiona. « De tout. Tu ne dis jamais grand-chose sur ta vie. »
« Je suis impliqué dans plus de boulots que je ne le voudrais en ce moment », avoue Draco, et je vois la colère dans ses yeux alors qu'il fixe le vide - mais Diane revient avec nos boissons préférées.
Fiona adorait son thé à la menthe. Draco adorait son chocolat chaud. J'adorais mon milkshake au caramel.
Nous attendons que Diane s'éloigne, puis Draco se redresse et enlace la taille de Fiona, la gardant sur ses genoux pendant qu'ils remuent leurs boissons.
Fiona me regarde simplement, ses yeux rouge foncé sachant - elle me comprend sans lire dans mes pensées. « Viens par ici. » Elle sourit quand je plisse les yeux, me sentant mise à l'écart.
« Allez, Ice. » Draco sourit à son chocolat chaud puis me regarde. Il ressentait aussi ma solitude.
« Hmm, d'accord. » Je souris, et je me lève pour monter sur la table avec mes talons, sautant rapidement à côté de lui, serrée dans le coin. Je l'ai fait vite et silencieusement pour que personne ne le remarque vraiment. Puis je tire mon milkshake vers moi et je bois avec la paille. J'appuie ma joue contre la large épaule de Draco, et Fiona pose sa main sur ma jambe.
Je ne sais pas pourquoi, mais nous nous étions rapprochés comme ça dernièrement - et ça faisait du bien. Juste être au chaud les uns avec les autres. Je sais que ça apaisait mon cœur.
Je sais que ça avait le même effet sur Draco. Quand il nous tenait, il se détendait. Il boit un peu de son chocolat chaud puis le repose pour me toucher. Sa main passe doucement dans mes cheveux, près de mon oreille. Je vois son autre main, reliée au bras autour de la taille de Fiona, caresser de haut en bas son côté.
J'ai toujours secrètement aimé la façon dont il nous touchait, comme si nous étions spéciales et lui appartenions.
« Bon sang, je ne veux rien d'autre », dit lentement Draco, le pensant vraiment. « Merde, ma vie. » Il laisse échapper un son de colère. « Merde à tout ça. »
« Qu'est-ce qui ne va pas ? » Je sens ses émotions, et il semble troublé. Quelque chose de grave s'est passé aujourd'hui qu'il a caché.
« Ma mère s'est enfuie, et mon père devient fou. Il pense que je la cache », Draco nous raconte son problème. « Je ne sais pas où elle est. »
« Pourquoi s'est-elle enfuie ? » demande Fiona.
« Il est trop violent maintenant. Il voit mon passage à l'âge adulte comme une sorte de défi, peu importe à quel point je suis calme, peu importe à quel point j'essaie de l'éviter, il menacera de lui faire du mal, pour me mettre en colère. » Draco a l'air blessé en disant cela, et nous l'avons entendu dire qu'il voulait tuer son père de nombreuses fois.
Mais il y avait beaucoup de criminels pires qui prendraient le contrôle, alors Draco voulait prendre lui-même les rênes des Roses quand il serait prêt.
Fiona et moi nous inquiétions, sachant que ce serait presque impossible. Mais il était vraiment coincé dans une situation délicate.
« Enfuis-toi aussi ? » je suggère. « Tu peux dormir sur mon canapé. »
« Je me cacherai aussi », supplie Fiona. « On peut tous se cacher et disparaître. »
« S'il trouve ma mère et que je ne suis pas là pour la protéger, elle sera morte. » Draco baisse encore la voix. « Ce n'est pas tout - mon père essaie constamment de me caser avec des filles ces derniers temps. Il veut que je comprenne ce que signifie être un vrai dragon, et il pense qu'avoir une compagne me changera. Je ne veux pas de ses stupides femmes qu'il me jette à la figure. Je vous ai toutes les deux et c'est toute la compagnie féminine dont j'ai besoin.
« Vous ne comprenez pas à quel point certaines de ces femmes sont répugnantes, celles qui traînent autour du gang. Bon sang, c'est pire que l'enfer. J'en ai marre d'être contrôlé par eux tous. Toujours crié dessus et rabaissé - la seule chose qu'ils ne font pas, c'est essayer de me battre, ou je les tuerais. »
Draco laisse finalement échapper un long soupir. « Je me sens un peu mieux. Je sais que tout ira bien. Je dois juste être patient. Qu'est-ce que vous avez fait, les filles ? »
Draco nous racontait toujours ses problèmes, puis il arrêtait d'en parler, ne voulant pas en dire plus. Alors nous savons toutes les deux qu'il faut changer de sujet maintenant.
« J'essaie de trouver des moyens de garder Evermore en sécurité », dit à nouveau Fiona, comme toujours. « Elle m'évite tout le temps, surtout ces derniers temps. Elle me trompe. Je pensais que ses parents lui rendaient visite aujourd'hui et à la place elle est allée faire du shopping sans moi. »
« Pour cette robe ? » La main de Draco glisse le long de ma peau nue dans mon dos. « Elle est très belle... vous l'êtes toutes les deux. »
« J'y suis allée seule parce que je voulais vous surprendre tous les deux », j'avoue. « Tu sais, on... on n'a jamais... » Je pensais pouvoir dire la suite avec assurance, mais j'ai immédiatement peur. Quand je regarde Draco, il sait exactement ce que j'allais dire et il essaie de ne pas sourire fièrement.
Fiona me regarde, perplexe.
« Hmm ? » demande-t-elle.
« Bois ton thé, Penny. » Draco embrasse son oreille, lui chuchotant quelque chose, et la regarde soupirer et se pencher en arrière.
« Pourquoi ça fait si bon ? » demande Fiona. « J'aime presque tes baisers... venant d'un connard comme toi. »
« Petite garce mignonne », dit Draco d'un ton joueur, et enfin des frites bien chaudes arrivent.
Nous avons tous faim et la tension s'évapore tandis que nous nous jetons sur les frites salées.
Bientôt, nous les avons toutes mangées, et Diane derrière le comptoir nous fait un clin d'œil en commençant à préparer la grosse glace.
« Ce n'était pas une si mauvaise surprise d'anniversaire après tout - » dit Draco, heureux, jusqu'à ce qu'il s'arrête net, et son visage se tourne vers la porte de Gypsy Love. « ...merde. »
J'entends une vraie peur, et son humeur devient sombre et violente. Sa main me tient fermement, me rapprochant, tandis qu'il pose son autre main sur la joue de Fiona et tourne son visage vers moi, s'assurant qu'elle ne peut pas voir.
Quand je regarde, pour la première fois, je vois le père de Draco de près - avec trois gardes derrière lui. Les gardes sont tous des Rouges aussi.
Les cheveux roux du père de Draco sont rasés, et seule sa peau couverte de cicatrices et son cou montrent à quel point il est violent. Cela montre combien de fois on a essayé de le tuer.
Ses yeux rouge foncé regardent son fils aîné tandis qu'il marche vers nous, se déplaçant avec détermination.
Il ne nous avait jamais rencontrées.
Mais Fiona l'avait rencontré quand elle travaillait pour de mauvaises personnes - et il l'avait touchée à un moment donné. Dire qu'il était la pire personne qui soit était un euphémisme. Je sens mes crocs pousser dans ma bouche, voulant le mordre.
« Papa ? » demande doucement Draco tandis que l'affreux Rose Rouge se tient près de notre table, ses lèvres esquissant un faux sourire qui disparaît lorsqu'il nous regarde tous les trois.
Les yeux de Fiona sont déjà pleins de larmes. Je tiens sa main et elle serre mes doigts très fort. Je serre en retour, espérant qu'elle sache que je la protégerai aussi.
Si le Rose Rouge ne fait ne serait-ce que respirer près d'elle, je vais lui planter une fourchette dans la poitrine. Peu importe ce qui se passera après.
« Alors tu es venu ici pour t'envoyer en l'air avec deux filles ? » demande calmement le père de Draco. « C'est un bel anniversaire pour toi, n'est-ce pas, fiston ? Tu es sournois. »
« Que veux-tu ? » demande Draco, et j'entends à quel point il parvient à avoir l'air tout aussi calme. « Si tu as besoin de moi, je finirai ça et je serai avec toi dans un instant. »
« Comme c'est gentil de ta part. Vraiment, je suis juste content de découvrir que tu n'étais pas impliqué dans la fuite de ma femme après tout, puisque tu es trop occupé à penser à ta queue. Pourquoi ne ramènes-tu pas ces deux-là à la maison ? »
« Non », répond Draco trop vite.
« Quoi... tu ne veux pas partager - ? » Le père de Draco fait une blague malsaine, et l'humeur rouge de Draco commence à se manifester. Le problème avec les Rouges est que quand ils se mettaient en colère - ils ne s'arrêtaient pas tant que la colère n'était pas partie. Avec nous ici, le père de Draco pourrait juste le mettre trop en colère.
Je dois faire quelque chose maintenant. Je n'ai pas le choix.
Avant que Draco n'attaque son père dans notre restaurant préféré, la seule chose qui arrête ça - c'est moi.
Je me lève d'un bond, me déplaçant doucement et silencieusement, tandis que je saute par-dessus mes amis et atterris devant nos ennemis. « Quatre Roses Rouges ne me font pas peur. Si quelque chose, je suis excitée de les tuer. »
Avec seulement ma magie maudite, je me tiens devant le père de Draco. Je lève une main avec du Feu de Glace - un morceau bleu qui gèle tout ce qu'il touche.
« Partez », je murmure au chef de la mafia. « S'il vous plaît. Partez. Je préférerais m'amuser quand ça se terminera, quelque part où je pourrai prendre mon temps pour vous faire mal. »
Je continue de chuchoter et de sourire, si excitée, mon cœur battant la chamade à l'idée d'un combat à mort. Sachant que je peux gagner.
Je sens des mains autour de ma taille. Fiona me tire, Draco aussi, me ramenant en arrière.
Le Rose Rouge recule lentement, les mains levées en signe de reddition, tandis qu'il se lèche les lèvres. « Une Argent ? Intéressant. »
Il a l'air avide, pensant à combien d'argent il peut gagner grâce à moi. C'est tout ce qu'il dit en se retournant et en ordonnant à ses hommes de quitter le restaurant.
Au moins, il n'a même pas regardé Fiona deux fois.
Je me tourne vers mes amis.
Fiona a essuyé ses larmes avec colère, et Draco a l'air très contrarié.
Je m'assieds de l'autre côté du box.
« Quoi ? » je demande aux deux, dans le silence. « Vous êtes en colère que j'aie - »
« Non », répond Draco, s'éclaircissant la gorge et passant une main dans ses cheveux roux. Il se penche en arrière, respirant fort. « Evermore, ce n'est jamais toi qui me mets en colère. »
« C'est le mal », dit doucement Fiona. Elle a l'air pâle et effrayée. Je m'inquiète de ce qu'elle ressent. Elle ressent des vagues de mauvais souvenirs, ramenés par l'apparition soudaine de son père.
« On doit partir, Draco. Pour Fiona », je suggère.
« J'ai votre dessert ? » Diane apparaît en s'approchant avec, le portant avec précaution.
« Désolé, ma chérie, on part plus tôt. » Draco lui donne un gros pourboire. « Tu peux le garder. »
Diane hoche la tête et retourne prudemment au comptoir.
Je remarque que les autres clients ont l'air inquiets par le drame silencieux qui vient de se produire.
Draco prend la main de Fiona tandis qu'il regarde dehors, pour s'assurer que son père est parti.
Quand c'est sûr, il l'emmène par la porte d'entrée et je sors automatiquement par l'arrière.
Je cherche des gens qui nous observent. Quand je n'en vois aucun, je cours vers sa voiture et monte à l'arrière tandis que Fiona s'assoit devant.
« D'accord. » Draco démarre la voiture. « Le plan ? »
Je décide. « Mon appartement. Tu peux te garer en sécurité au sous-sol, et Fiona a mis tellement de sorts magiques sur mon endroit - ils ne nous trouveront jamais, même s'ils trouvent ta voiture. »
« Je ne rentre pas chez moi ce soir », ajoute Draco, l'air nerveux à ce sujet. « Mon père aura besoin de se calmer d'abord - »
« C'est bon », j'ajoute. « Soirée pyjama ? Fiona. Ça va ? »
« Oui », dit Fiona d'une petite voix, et je tends le bras autour du siège pour serrer son épaule, espérant que mon contact la fasse se sentir mieux.
Draco prend sa main et ne la lâche pas. Il s'éloigne sans rien dire.
Nous avons notre plan.
Rester ensemble.
Oublier le monde.
La vraie vie peut attendre encore un peu.
