Servante de l'Alpha

Ma vie n'a rien d’ordinaire. Depuis le jour de ma naissance, mon destin dans un monde de loups-garous est d’être une simple servante. C'était inévitable. Les humains sont mal traités, et les loups-garous règnent sur nous.

Certaines de leurs règles ont été établies pour maintenir la soi-disant loi et l'ordre entre les loups-garous et les humains, pour empêcher les humains de se rebeller, mais nous savons tous qu’elles n’ont été créées que pour leur profiter à eux.

Et un simple humain n'aurait de toute façon aucune chance contre un loup-garou moyen.

Je travaillais comme esclave domestique pour la meute de la Lune de Sang dans l'un de leurs domaines, loin du siège de la meute. C'était la plus grande et la plus puissante des cinq meutes existantes.

Mes journées commençaient avant le réveil de mes maîtres et se terminaient après leur coucher. Rien ne changeait jamais.

Dans chaque domaine, il y avait des loups qui travaillaient pour l'Alpha. Comme les domaines étaient dispersés dans tout le pays, ils avaient besoin de quelqu'un pour les diriger efficacement, d'où la nécessité d'un directeur sur place, qui se devait d’être un loup-garou.

C'est également ainsi que fonctionnaient les cinq autres meutes de loups-garous.

L'Alpha de la meute dans laquelle je travaillais était le plus meurtrier de tous, on aurait presque pu dire qu'il était fou... Enfin, c'est ce que disaient les rumeurs. Il était comme une bombe à retardement prête à exploser, un monstre assoiffé de sang.

Les gens disaient qu'il avaient été béni par les dieux, qu'ils l'avaient rendu impitoyable et indestructible au point que même les autres Alphas le craignaient, mais cette bénédiction s'accompagnait aussi d'une malédiction. Et le simple fait de penser à lui me donnait des frissons, à moi comme à n'importe qui d'autre.

Mais encore une fois, il protégeait la meute des loups renégats, parce qu'ils n'osaient pas mettre un pied dans sa meute, mais cela ne signifiait pas que la vie était plus facile pour nous, les humains. Si nous étions effectivement à l'abri des loups renégats, on ne nous permettait pas pour autant d’être libres.

D'après ce que j'avais entendu dire de lui, l'Alpha était un être maudit, plus loup qu'homme, et voué à ne jamais trouver sa compagne.

Cela signifiait qu'il n'aurait jamais d’âme sœur, et le fait de voir toute sa vie d'autres loups heureux avec leurs compagnes avait dû avoir un impact sur sa santé mentale. On disait qu’il était devenu aussi impitoyable en se confinant dans l'obscurité, ne sortant que lorsqu'une question d'importance se présentait.

Et c'est à ce moment-là qu'il sortait pour tuer. C'était une âme destructrice, qui se délectait du sang de ses adversaires et dispersait leur chair comme le vent emporte des cendres. Et c'est pour cela que tout le monde le craignait...

« Skyler ! »

J'ai poussé un cri en entendant mon nom, mais une main s’est immédiatement posée sur ma bouche, bloquant le son. J'ai levé les yeux et poussé un soupir de soulagement en voyant de qui il s'agissait.

« Scarlette... ne me fais pas ce genre de frayeur ! » ai-je pleurniché tout en m'agrippant dramatiquement au côté gauche de ma poitrine.

« Oh, je t'en prie. Nous savons toutes les deux à quoi tu pensais, pour réagir de la sorte », a-t-elle grogné.

« Comment le sais-tu ? » ai-je demandé en poussant un petit rire nerveux.

« Parce que tu étais juste plantée là, à regarder la vaisselle au lieu de la faire et... que tu transpires à grosses gouttes », a-t-elle fait remarquer.

C’était tout à fait vrai. J'ai baissé les yeux et j'ai vu mes mains, plongées dans l'évier où trempait une montagne de vaisselle sale.

Mes yeux se sont écarquillés à l'idée que c’est le directeur qui aurait pu me surprendre à négliger mes tâches à la place de Scarlette. Dieu merci, elle veillait toujours sur moi.

« Je ne sais même pas pourquoi tu as si peur de lui », a-t-elle déclaré tout en retroussant ses manches pour m'aider à laver la vaisselle.

« Eh bien, qui n’a pas peur de lui ? » ai-je demandé faiblement.

J'ai senti des mains douces se poser sur mon visage et j'ai doucement tourné la tête.

« T'inquiéter ne t’avancera à rien. Vois plutôt les choses de cette façon : il ne ferait jamais de mal à une simple humaine comme toi, et s'il le faisait, ne serait-ce pas enfreindre la loi, celle-là même qu'il fait respecter ? » m'a-t-elle expliqué.

« Je sais, je sais, il est effrayant, c'est tout, mais je vais essayer de ne pas laisser mes pensées s'égarer à partir de maintenant. » J’ai soupiré et lui ai adressé un sourire rassurant.

Scarlette était une figure maternelle pour moi. Lorsque mes parents étaient morts et que j'avais été amenée au domaine pour y travailler, elle m'avait accueillie, prise sous son aile et avait pris soin de moi.

Je ne connaissais pas vraiment les circonstances de la mort de mes parents, mais je savais avec certitude qu'ils étaient morts lors d'une attaque de renégats.

« Bon, puisque c'est réglé, je suis venue te dire quelque chose, même si je ne pense pas que tu sois prête à l'entendre », a-t-elle dit d'un air sceptique en me regardant dans les yeux.

« Attends une minute... tu n'es pas venue ici pour m'aider à faire la vaisselle, alors ? » ai-je demandé en plaisantant.

« Idiote, évidemment que je ne suis pas venue ici pour t'aider à faire la vaisselle », a-t-elle dit en me pinçant le bras, alors qu'elle avait retroussé ses manches pour m'aider seulement quelques instants auparavant.

« Alors, pourquoi es-tu ici ? » lui ai-je demandé.

J'ai alors vu toute son attitude changer, elle m'a regardée sérieusement et a posé un bras sur mon épaule droite.

« Il vient ici dans une semaine », a-t-elle dit en expirant. Je ne comprenais pas vraiment ce qu'elle venait de dire. En la regardant, j'ai vu qu'elle avait l'air épuisée et qu'elle tenait à peine le coup.

« Qui vient ? » ai-je demandé, d’une voix pleine d’incertitude. Mais elle s'est contentée de soupirer et de me faire un petit sourire.

« Arès... Alpha Arès », a-t-elle dit calmement.

Mon souffle s'est coupé et mon cœur s'est mis à palpiter dans ma poitrine. L'idée même de respirer le même air que lui suffisait à me mettre dans tous mes états, et voilà qu'il visitait le domaine, où j’allais probablement me retrouver en sa présence.

« Comment le sais-tu ? »

« Le directeur nous l'a dit », a-t-elle répondu d’un ton entendu.

« Oh », ai-je murmuré.

« Oui, je vais faire de mon mieux pour qu'ils te donnent d'autres tâches afin que tu n'aies pas à le côtoyer », a-t-elle dit en déposant un baiser sur mon front.

« Merci. » ai-je répondu doucement en la serrant dans mes bras, avant de m’éloigner pour retourner faire la vaisselle, pendant que Scarlette partait vaquer à ses tâches.

Ses paroles n'arrêtaient pas de résonner dans ma tête. Alpha Arès allait-il vraiment venir au domaine ? Pour quelle raison ? Je n'en savais rien. Mais j’étais contente qu'elle me l'ait dit une semaine avant sa venue.

Honnêtement, je ne savais pas pourquoi j'avais si peur de lui. Je me comportais comme une gamine qui croyait qu’il y avait des monstres sous son lit ou dans son placard.

Je me suis rassurée en me rappelant ce qu'elle m'avait dit, et si jamais les choses se gâtaient, je pourrais toujours me faire porter pâle. Mais je me demandais combien de temps il allait rester.