Je gémis, mon dos me faisant terriblement souffrir. Jamais je n'avais ressenti une telle douleur, ni dans mon corps ni dans mon esprit.
« Savvy ! Calme-toi ! Tu vas finir par faire une crise de panique. Respire doucement. Prends de grandes inspirations et expire lentement. » Shelly inspira profondément et expira doucement, me montrant l'exemple.
Même si j'avais envie de la mettre à la porte pour m'avoir parlé comme à une gamine, je suivis ses instructions.
« C'est bien. Reste tranquille », dit-elle, respirant toujours lentement entre les mots. « Maintenant, écoute-moi. Tu n'as renversé personne. Ce serait aux infos si c'était le cas. »
« Tu n'en sais rien ! » Je regardai Shelly, les larmes aux yeux. « Tu as entendu ce qu'a dit le détective ! Que pourrait vouloir dire d'autre « toutes les parties » ? »
« Ça pourrait signifier plein de choses. »
« Ça ne veut dire qu'une chose. Je n'étais pas seule là-bas. Il y avait au moins une autre personne ! Quelqu'un que j'aurais pu... » Je me sentais trop coupable pour finir ma phrase, et Shelly me prit la main.
« Bien sûr que tu n'étais pas seule, Savvy. » Elle m'adressa un petit sourire. « Quelqu'un a appelé les secours. Quelqu'un t'a sortie de ta voiture. Il pourrait parler des gens qui t'ont aidée, ou de quelqu'un qui a vu ton accident. Ça pourrait être n'importe quoi. »
Sa voix apaisante ne me rassurait pas. « Ouais, et ça pourrait aussi vouloir dire que j'ai tué quelqu'un ! » Après l'avoir dit tout haut, j'éclatai en sanglots.
Shelly soupira. « Savvy, tu te fais des idées. Tu ne peux pas te mettre dans cet état ! Il n'y a aucune raison de penser au pire. » Elle se leva. « Je vais appeler l'infirmière pour qu'elle t'aide à dormir. Tu as besoin de repos. »
« Non ! » J'essayai de lui arracher la télécommande, mais elle la mit hors de ma portée. « Je n'ai pas besoin de dormir ! J'ai besoin de comprendre ce qui s'est passé ! » Je me redressai et repoussai les couvertures, tentant de sortir du lit.
Juste avant que mes pieds ne touchent le sol, une infirmière entra. Rapidement, elle et Shelly me remirent au lit. Je les suppliai de me laisser partir jusqu'à ce que je sente la chaleur du médicament se répandre dans mon corps.
Alors que je commençais à m'assoupir, je me souvins de quelque chose.
J'essayai de me concentrer sur ce souvenir, mais le médicament me rendait trop somnolente, et je sombrai dans un profond sommeil.
Deux jours plus tard, je quittai enfin l'hôpital. J'étais restée dans ce lit pendant six jours, mais j'avais l'impression que ça faisait un mois.
En sortant, je respirai l'air frais. Mes longs cheveux étaient attachés en un chignon désordonné, et le vent sur ma nuque était agréable. C'était apaisant, mais mon esprit restait embrouillé.
Je devais découvrir ce qui m'était arrivé, même si je devais le faire seule. J'interrogerais le détective tous les jours, et s'il refusait de me répondre, je commencerais à chercher des réponses par moi-même.
Shelly ne mit pas longtemps à revenir avec sa voiture, mais pendant ce temps, j'avais déjà établi un plan pour la suite.
Dès que j'eus bouclé ma ceinture, je commençai à énumérer tout ce dont j'aurais besoin avant d'arriver à l'appartement de Shelly : un téléphone, de nouveaux vêtements, un carnet et un stylo, et le numéro de téléphone du détective.
Le rire de Shelly me surprit. Je la regardai en haussant les sourcils. Elle riait comme si elle avait perdu la tête.
Voyant mon air perplexe, elle dit : « Oh là là, Savvy, tu es sérieuse ? Tu penses vraiment que je vais te laisser faire tout ça alors que le médecin a dit que tu devais te reposer ? C'est la seule raison pour laquelle ils t'ont laissée sortir !
« On lui a promis que tu prendrais du repos pendant les prochains jours. » Elle prit un air sérieux et hocha la tête. « Et c'est exactement ce qu'on va faire ! »
« Ça ne prendra pas longtemps de faire ces choses ! » Je levai les yeux au ciel et poussai un grognement frustré. « Ce n'est pas grand-chose. Il faut que j'aie un téléphone. Et des vêtements. »
Shelly répliqua du tac au tac : « Je ne vais pas conduire jusqu'au centre commercial pour t'acheter un nouveau téléphone, et tu peux emprunter mes vêtements comme d'habitude. Et c'était quoi le reste ? Un carnet et un stylo ? Pourquoi tu as besoin de ça ? »
Ne voulant pas mentir, je murmurai : « Pour noter mes progrès à mesure que je me souviens de choses et que je découvre ce qui s'est passé. »
Shelly éclata de rire à nouveau, encore plus fort. « Savvy ! Tu as perdu la boule ? C'est n'importe quoi ! Non. Pas question. On te ramène à la maison, et tu te reposes. Point final. »
Je croisai les bras et fis la moue comme une gamine. « On peut au moins appeler le détective Lawrence ? On n'a pas besoin d'aller à son bureau, mais on peut au moins l'appeler et lui demander s'il y a du nouveau ? »
« Non, Savvy. Pas aujourd'hui. Laisse à cet homme le temps de faire son boulot. Si on n'a pas de nouvelles d'ici quelques jours, je l'appellerai moi-même. D'accord ? »
J'acquiesçai, mais je n'étais pas vraiment d'accord. Je jouerais le jeu avec Shelly pour l'instant, mais bientôt, je mettrais mon plan à exécution.
Le reste du trajet, on a discuté de la possibilité que je me souvienne de ce qui s'était passé. Shelly était persuadée que c'était impossible. Elle pensait qu'à cause de l'accident et de l'alcool dans mon organisme, c'était très peu probable.
J'étais ravie de lui prouver qu'elle avait tort en lui parlant du souvenir de quelqu'un me tirant de la voiture. Mais Shelly ne pensait pas que c'était important. Elle dit que quelqu'un m'avait évidemment sortie de la voiture et que ce n'était pas un vrai souvenir mais juste du bon sens.
Ses doutes ne me décourageaient pas. Je savais que si je commençais à me rappeler de petits détails de cette nuit-là, je finirais par reconstituer ce qui s'était passé.
Je me sentais très déterminée à faire les choses à ma façon, peut-être pour la première fois de ma vie. Je ne m'étais jamais sentie aussi sûre de quoi que ce soit auparavant. Je ne me souvenais vraiment pas d'avoir déjà été aussi concentrée et confiante.
Cette sensation me donnait de la force ; j'aimais ça.
Nous arrivâmes à l'appartement de deux chambres de Shelly, et après avoir couvert Chuckles de plus de baisers qu'il n'en voulait, elle m'ordonna d'aller prendre une douche illico. J'étais heureuse de m'exécuter. J'adorais l'eau chaude et pouvoir enfin me laver les cheveux.
Je fis attention à ne pas mouiller mes points de suture pendant que l'eau coulait le long de mon dos. L'infirmière avait retiré le pansement, disant que je n'en avais plus besoin. Je devais juste surveiller la plaie et revenir si elle me faisait très mal ou gonflait.
« Tu sais où tout se trouve, alors prends ce dont tu as besoin », dit Shelly depuis le canapé après que je sois sortie de la salle de bain embuée. « J'ai mis des vêtements confortables dans la chambre d'amis et un verre d'eau à côté de tes antidouleurs sur la table de chevet.
« Je suis sûre que tu dormiras beaucoup mieux dans ce lit qu'à l'hôpital. » Shelly sourit fièrement.
« Merci, Shelly ! » Je lui rendis son sourire avec autant d'enthousiasme. « C'est parfait. J'ai tout ce qu'il me faut. » J'entrai dans ma chambre, mais avant de fermer la porte, je murmurai pour moi-même : « Pour l'instant, du moins. »
Après avoir enfilé un grand t-shirt et un pantalon de pyjama doux, je pris mes antidouleurs. Je me sentais déjà mieux que je ne l'avais été depuis des jours. Une douche chaude et des vêtements propres peuvent presque tout arranger.
Je m'allongeai sur le lit, en faisant attention à ne pas me faire mal. Bientôt, le médicament commença à faire effet, et tout devint un peu flou.
Pour la première fois depuis l'accident, je me sentais vraiment détendue. Mon esprit ne s'emballait pas, et je ne m'inquiétais pas de ce que je ne savais pas. J'étais persuadée de pouvoir découvrir la vérité.
Me sentant si relaxée, je m'endormis rapidement.
J'eus l'impression que le rêve commença immédiatement, mais une partie de moi savait que ce n'était pas un rêve ordinaire, alors je le laissai se dérouler, essayant de remarquer tous les détails.
Mais je pouvais voir l'image clairement, et je me réveillai en sursaut, les yeux grands ouverts.
« C'était un pompier ! » dis-je à voix haute. « Un pompier m'a sauvée ! Je dois le retrouver ! »
