Flingues & Royautés - Couverture du livre

Flingues & Royautés

HF Perez

Pensées sauvages

Beau

Voilà ! Mission accomplie ! Beau l'avait fait. Elle avait fixé son objectif et l'avait atteint. Avec brio. Plusieurs fois.

Beau est sortie de la suite sur la pointe des pieds avec ses Manolos, grimaçant devant la douleur qu'elle ressentait entre ses cuisses endolories. Chaque muscle de son corps protestait.

Il était six heures du matin, et le soleil n'était pas encore sorti pour embrasser l'horizon, et pourtant elle se faufilait comme une voleuse hors de la chambre d'un homme. Pourquoi ne pouvait-elle pas être comme les filles normales, se demandait-elle. La question était rhétorique.

Elle aurait pu se réveiller avec le type avec qui elle avait fait l'amour toute la nuit et peut-être même prendre le petit-déjeuner avec lui. Au lieu de cela, elle fuyait.Tu sais pourquoi.

Mais ce gars était si délicieux !

Alors c'est une sacrée bonne raison de bouger.

Tu as raison.

Merde !

Pourquoi avait-elle un débat avec sa conscience ? Cette question, elle en connaissait la réponse.

Beau s'épargnait l'humiliation qu'elle ressentirait sûrement lorsqu'il la virerait de sa chambre. Voilà pourquoi. Un coup d'un soir n'avait pas changé de définition, c'était toujours un simple « baise et casse-toi ». Pas d'adieux. Pas de promesses.

En plus, elle avait d'autres raisons, plus importantes.

Elle faisait la grimace. Il avait été presque impossible de se dégager de ses bras. Il était tombé sur elle après leur énième partie de jambes en l'air, tous deux épuisés, incapables de bouger.

Elle s'était presque endormie. Dieu merci, elle n'avait pas succombé à l'épuisement. Elle avait réalisé que c'était l'aube et qu'elle devait se hâter avant qu'il ne se réveille.

Le cœur lourd, et après avoir contemplé son physique parfaitement sculpté assez longtemps pour le mémoriser, elle a enfilé sa robe froissée, sans sous-vêtements.

Elle s'est penchée pour lui embrasser doucement la joue, pour le remercier de la plus belle soirée de sa vie. Il a remué un peu sans se réveiller et a serré l'oreiller qui portait son parfum.

Elle a souri avec nostalgie, souhaitant pouvoir rester. Mais elle ne le ferait pas. La vie était déjà bien assez compliquée comme ça. Elle n'avait pas besoin d’en rajouter.

Tout au long du trajet en ascenseur qui l’amenait au premier étage de l'hôtel, elle se sentait nerveuse. Elle avait envie de retourner auprès de lui. Elle s'est soudainement mise à stresser, bien qu'elle ne sache pas trop pourquoi.

Ses pieds nus ne faisaient pas de bruit sur les carreaux de marbre étincelants de l'élégant hall. Elle devait faire peine à voir, avec ses cheveux ébouriffés, ses lèvres gonflées et sa robe froissée.

Elle a rougi en tapotant ses cheveux pour tenter de les dompter. Elle devait avoir le look d'une folle, car les employés la fixaient, choqués.

Son cœur s'alourdissait alors qu'elle sortait de l'hôtel cinq étoiles. Elle ne savait pas pourquoi mais ses pieds essayaient de la ramener à l'intérieur. Mais elle ne pouvait pas. Elle connaissait trop bien les règles. Un coup d'un soir. Sans attaches.

De plus, les hommes comme lui avaient des petites amies et des maîtresses en abondance. Il pouvait même être marié.

À cette pensée, ses yeux se sont remplis de larmes et elle a pris une profonde inspiration. Comment avait-elle pu être aussi stupide ? Elle s'est résignée au fait qu'elle pouvait être enceinte. Elle l'avait voulu. Mais faire l'amour avec un homme marié aurait dû être hors de question.

Il n'avait pas d'alliance, Beau.

Elle a plissé les yeux, essayant de réfléchir. Non. Il n'en avait pas.

Cela l'a aidée à se détendre un peu. Néanmoins, elle ne reviendrait pas en arrière, peu importe à quel point elle voulait qu'il soit en elle à nouveau. De plus, c'était un étranger, un Russe. Elle était sûre qu'il serait parti dans quelques jours, et qu'elle ne le reverrait jamais.

Cette pensée a refroidi son humeur encore plus.

***

Beau avait pleuré tout le long du chemin depuis l'hôtel. Incroyable ! Ses yeux étaient gonflés maintenant, et elle respirait par la bouche car son nez était bloqué. ~Parfait !~

Elle s'est enfoncée davantage dans sa baignoire, savourant l'eau chaude, tandis qu'elle sentait ses muscles endoloris se détendre. La douleur de ses parties génitales la mettait encore un peu mal à l'aise. C'était un doux rappel de lui. Elle soupira.

Il ne serait toujours qu'un lointain souvenir. Si elle tombait enceinte, alors elle serait la femme la plus heureuse du monde.

Les yeux de Beau étaient lourds. Elle sentait l'épuisement dû aux activités de la nuit dernière et du début de matinée. Elle avait perdu le compte du nombre de fois qu'ils l'avaient fait.

Elle se dit qu'elle ferait mieux de faire une sieste bien méritée et de parler à Lily plus tard.

Une sonnerie familière provenant de loin, probablement de son salon, a tiré Beau de son sommeil.

Elle grimaça d'agacement. L'eau était froide et elle était toute fripée. Elle a retiré le bouchon pour vider la baignoire avant d'enfiler son peignoir douillet.

Elle a attrapé le dispositif Bluetooth, qui était connecté à un serveur sécurisé. Son téléphone portable s'y trouvait également.

« Bonjour, Beauté. »

Elle a levé les yeux et n'a pas pu s'empêcher de sourire à l'accent britannique robotique de son amie.

« C'est Beauté Grace. »

« Gros soupir. »

« Quoi de neuf, Lil ? »

« Les Marcelinos ont encore besoin de ton expertise. Ils cherchent le dossier. »

« C’est chiant, Lil. Quelqu'un d'autre ? »

« Un autre gros soupir. »

Beau a souri.

« Les Marcelinos sont prêts à payer le double. Je te suggère d’accepter, Beauté. »

« D'accord. Je vais accepter. Je dois cependant te prévenir, je vais avoir fini dans un jour ou deux, alors tu dois m'en trouver un autre. »

« Je le ferai. Oh, et l'un des clients veut rencontrer B. G. Anderson. »

« C’est pas une bonne idée, Lil. Je ne veux pas de conflit. Et ils ne savent pas qui je suis vraiment. Restons comme ça. »

« Je suis d'accord avec toi, Beauté Grace. Prends soin de toi. Envoi du fichier sur un serveur sécurisé. Je mets fin à l’appel. »

Ça s'est bien passé, a pensé Beau. D'habitude, Lily la torturait avec un sermon sans fin sur les mérites de la vie. C'était au tour de Beau d'expirer lourdement lorsque l'appel s'est terminé.

Lily lui manquait. Elles avaient grandi ensemble dans un orphelinat et avaient toujours veillé l'une sur l'autre. Elle était la seule famille que Beau avait.

Sa meilleure amie était sourde et muette, ce qui était la principale raison pour laquelle Beau était farouchement protectrice envers elle. Ça et le fait que Lily était la seule à connaître son secret.

Le fait d'avoir été diagnostiquée avec un QI de 220 avait été un fardeau pour Beau. Un cauchemar qu'elle avait dissimulé et refoulé.

Elle ne voulait pas être vue comme un monstre de la nature. Et elle ne voulait surtout pas faire l'objet d'expériences dans une installation gouvernementale. Mais plus que tout, elle ne voulait pas perdre Lily.

À l'âge de sept ans, Beau apprenait déjà à Lily le langage universel des signes. Elle avait mémorisé et résolu toutes les équations mathématiques qui existaient. Son esprit était constamment en travail.

Les ondes cérébrales dans sa tête étaient toujours agitées, débordant d'équations, de puzzles et d'idées qui n'étaient pas de ce monde. Seule Lily la maintenait ancrée. Elle avait appris à se canaliser pour sa meilleure amie.

À l'âge de dix ans, elle luttait pour prétendre ne pas en savoir plus que ce qui était enseigné à son âge.

Elle avait toujours eu besoin de plus. Tout d'abord, elle avait décidé qu'elle avait besoin de plus de livres, principalement en langues étrangères, et même alors, d'équations mathématiques non résolues par des génies. Mais il lui fallait de l'argent pour cela.

Elle suppliait Mme Anderson, de sa famille d'accueil, de la laisser faire des gâteaux et d'aller de maison en maison pour les vendre. Dieu merci, l'accro au crack avait accepté l'idée grâce à l'offre d'une commission.

Beau étudiait en secret. Elle élargissait ses connaissances et renforçait ses compétences. Elle avait appris quarante langues, dont le latin et l'hébreu.

Plus tard, elle avait obtenu son propre ordinateur grâce à l'argent qu'elle et Lily avaient économisé en vendant des friandises. À ce moment-là, Beau avait décidé de créer son propre site Web avec une IP intraçable.

Son expertise en mathématiques lui avait bientôt permis de gérer des rapports financiers, y compris des investissements et des dépenses compliqués, qui donnaient le tournis. Elle analysait les transactions, recoupant chaque détail infime des données.

Le seul inconvénient était qu'elle était mineure à l'époque, et donc, aucune entreprise légale n'emploierait un comptable de son âge. La solution évidente avait été de s'enfoncer dans le Dark Web.

Elle y avait trouvé des clients qui fermeraient les yeux tant qu'elle gèrerait leurs comptes et leurs investissements. En retour, ils remplissaient ses cartes prépayées après chaque contrat, sans poser de questions.

Comme elle avait un flux régulier d'argent, elle avait pu payer les études de Lily. Lily devait aller dans une école spéciale, et Beau n'avait aucun problème à assumer ses dépenses.

Grâce à son apprentissage rapide, Beau avait obtenu son diplôme d'études secondaires à quatorze ans. Elle était entrée à Berkeley à quinze ans et avait obtenu une licence en finance et comptabilité à dix-neuf ans, avec mention très bien.

Elle avait obtenu sa maîtrise et son doctorat la même année. À vingt ans, elle avait sa propre entreprise et elle était son propre patron.

Sa sœur de cœur, Lily, était devenue enseignante spécialisée, était tombée amoureuse d'un homme prénommé Adam et avait déménagé en Angleterre. Beau était heureuse qu'elle ait trouvé l'amour et restait sa meilleure amie. Lily travaillait également toujours comme sa secrétaire à temps partiel.

Lily était la seule personne à qui elle pouvait confier sa vie. Si ses clients et leurs hommes apprenaient un jour qui elle était, Beau savait qu'elle aurait beaucoup d'ennemis.

***

Cinq jours de routine. Cinq jours d'agitation. Cinq jours d'enfer.

L'analyse financière avait été remise quelques minutes après les livres de compte.

Secouant la tête, Beau s'était alors mise à nettoyer son chalet pittoresque. Il était situé à la périphérie de la ville, et tout ce qu'elle pouvait entendre là-bas, c'était le chant des cigales dans le soir calme.

Mon Dieu ! Cela faisait cinq putains de jours qu'elle faisait la même chose. L'endroit était si propre, à la limite du stérile, qu'elle aurait pu dormir nue sur le sol de la cuisine sans être contaminée par un quelconque type de bactérie. Superbe putain d'analogie.

Elle pariait que Dominic aimerait voir ça.

Merde ! D'où venait cette pensée ? Elle ne pouvait pas. Pas avec lui. Elle se mettrait à pleurer à nouveau si elle continuait à penser à lui. Et elle ne pouvait pas s'infliger ça.

C'était un engouement absurde qui ne mènerait nulle part. Elle ne pouvait tout simplement pas s'engager dans cette voie. Et même si c'était possible, elle ne voudrait pas apporter des ennuis sur le pas de sa porte.

Car s'il y avait une chose dont elle était sûre, c’est que les ennuis la poursuivaient.

Elle avait plongé dans l'inconnu. Pour la première fois de sa vie de génie, elle ne connaissait pas l'équation qu'elle devait appliquer pour trouver la solution à sa situation.

Il n'y avait pas à le nier. Pour un génie, elle s’était montrée stupide au plus haut point.

Elle, Beau Anderson, était tombée. Dans tous les sens du terme.

***

« Hé, Lily Billy. Quoi de neuf dans l’Ouest ? »

« Je lève les yeux devant ta bêtise. »

Beau a souri à sa réponse malgré sa mélancolie.

« Je sais que tu m'aimes. »

« J'aimerais que ce ne soit pas le cas. Je secoue la tête. Je t’ai trouvé un client. »

Le système Beau, qu'elle avait inventé de toutes pièces, était plus avancé que le Wuxi de Chine. Son ordinateur pouvait effectuer environ 200 000 trillions de calculs par seconde. Et elle pouvait entrer dans n'importe quel serveur sécurisé connu de l'homme.

Il était deux fois plus rapide et trois fois plus efficace que n'importe quel système au monde et pouvait facilement surpasser n'importe quel logiciel.

Elle était prête à parier que le Pentagone aimerait mettre la main sur son bébé. Dommage qu'ils ne le puissent pas. Son invention était profondément ancrée dans son cerveau. Ils devraient la tuer et la disséquer pour avoir la moindre possibilité de savoir comment en construire un.

Si sa prochaine invention réussissait, elle serait capable d'entendre la voix de Lily, de lui donner une vraie voix, une voix qui viendrait réellement de ses cordes vocales.

« Beauté Grace. Je tapote mes doigts sur la table. »

« Eh...je suis toujours là, Lil. »

« Le client ? Gros soupir. »

« OK. Le nom de la société ? »

« DV Corporation. Propriétaire d'hôtels, de restaurants, de stations balnéaires et de casinos. Ils possèdent également diverses compagnies maritimes. À ce que j’ai compris, ils ont gagné des milliards de bénéfices au cours des trois dernières décennies. En euros.

Le responsable de la comptabilité a remarqué des anomalies au cours des deux dernières semaines. La différence est de 200 millions d'euros. Tu connais le type. C'était un de tes collègues. Daniel. »

« Waouh. Si le calcul initial venait de cette tête de nœud, alors c'est le bordel. Quand recevrai-je les données ? »

« Je secoue la tête devant ton langage. Les jumelles jouent derrière. Il y a un hic. »

Beau souhaitait pouvoir vraiment entendre Lily et le bruit des jumelles en arrière-plan. Elle a souri à cette idée.

« Le client veut te rencontrer et que tu travailles depuis leur bureau principal. J’en ai des frissons. Il attend la réponse. »

« Tu sais que je ne fais pas ça, Lil. »

« Tu veux du légal, et c'est comme ça que le légal fonctionne. Je me tape la tête sur la table à cause de ton entêtement. »

« Je sais... C'est juste que... » Oserait-elle lui dire ?

« S'il te plaît. Pour moi ? Je m'inquiète pour toi. Tu dois sortir. »

Si seulement Lily savait.

« Ne t'avise pas de pleurer, Lil. Tu sais que je déteste ça. »

« Je sanglote. Les enfants me prennent dans leurs bras. »

Lily l'avait eue là. Mince !

« Tu ne joues pas franc jeu, Lily. Je suis en colère contre toi. Mes lèvres font la moue, et je m'arrache les cheveux. »

« Rire fort. Je sais que tu nous aimes, moi et les enfants. C'est pourquoi tu vas faire ça et arrêter de travailler pour tes clients douteux.

De plus, ils te paieront le double. Ils veulent juste le rapport, genre, tout de suite. Tu es la seule à pouvoir le faire. »

« OK. Tu as gagné. Quand ? »

« Sourire triomphant. Lundi à 9 heures, bâtiment principal de DV Corporation, au bord de la place financière dans Union Street. Sourire en coin. »

« Ouais. Ouais. Vous me manquez, toi et les filles, Lil. »

« Tu nous manques aussi. Sérieux. Visage triste. J'aimerais que tu puisses nous rendre visite. »

« Je ne peux pas faire ça. Je ne veux pas risquer de vous mettre en danger, toi et mes nièces. Je t'aime. »

« Un autre gros soupir. Je t'aime, Beauté Grace. »

« Ouais. On se parle bientôt. Bye. »

Le bip de l'appareil Bluetooth a signalé que l'appel était terminé.

Pourrait-elle vraiment le faire ? Serait-elle capable de tolérer les gens dans un environnement d'entreprise ? Elle supposait avoir le week-end pour se convaincre de ne pas le faire.

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