L'Âme Sœur Maudite

Elena se tenait à la fenêtre de sa chambre, observant en silence la neige tomber dehors. Le monde semblait paisible. Elle serra son pull contre elle, s'enlaçant pour se réchauffer.

Elle regardait les gens marcher dans le froid, faire leurs courses et travailler dur pour nourrir leurs familles. Elle passa la main dans ses longs cheveux bruns bouclés avant de pousser un soupir.

Ses yeux d'un bleu vif reflétaient la lumière de la neige tandis qu'elle continuait d'observer le monde en contrebas, rêvant d'être ailleurs.

Elena et son père vivaient dans la dernière colonie humaine de l'Idaho. Ils étaient cachés dans les montagnes, là où personne ne les chercherait. Cela faisait presque 30 ans que les métamorphes étaient sortis de l'ombre.

Autrefois, les métamorphes n'étaient que des histoires à dormir debout ou des films de cinéma. Avant, ils vivaient parmi les humains, mais maintenant c'étaient les humains qui essayaient de survivre dans le monde des métamorphes.

Les métamorphes étaient plus grands, plus forts, plus rapides et plus violents. La guerre entre humains et loups avait mis le monde sens dessus dessous. Les métamorphes étaient désormais aux commandes, et les humains étaient soit esclaves, soit cachés.

Elena faisait partie des chanceux qui se cachaient.

Leur colonie était perchée en haute montagne, où les hivers étaient rudes. Ils avaient un petit village, niché dans l'épaisse forêt, avec un grand bâtiment sécurisé construit à flanc de montagne, doté de passages secrets pour s'échapper et rester en sécurité.

La plupart des gens vivaient dans de petites maisons de fortune. Son père étant l'un des conseillers de la colonie, contrairement à beaucoup d'autres familles, ils avaient une vraie maison en béton. Mais ils n'en avaient pas vraiment besoin. Son père n'était presque jamais là.

Elle passait la plupart de ses journées seule, à regarder le monde continuer sans elle. Elle rêvait du jour où elle pourrait aller au cinéma ou à l'université. Elle voulait vivre seule, quelque part près de la mer. Elle avait toujours pensé que la plage serait merveilleuse.

« Elena ! »

Elle tourna la tête en entendant son nom, se dirigeant rapidement vers la porte d'entrée. « Bonjour, père ! Comment s'est passée la réunion du conseil ? »

« Bien », dit-il d'un ton maussade en lui donnant sa veste. Son gros ventre tressautait tandis qu'il se dirigeait vers son bureau. « Préviens-moi quand le dîner sera prêt. »

Elle répondit doucement « Oui, monsieur » avant d'accrocher son manteau et de se diriger vers la cuisine. Elle s'arrêta en ouvrant le réfrigérateur, regardant la photo de leur famille sur un aimant. Sa mère lui manquait.

Sa mère était morte dix ans plus tôt, quand Elena avait onze ans. Son père, John, avait toujours été strict, mais à la mort de sa mère, il s'était complètement renfermé. Il était devenu dur et grincheux, restant toujours seul dans son bureau. Elle avait donc dû grandir rapidement par elle-même.

Alors qu'elle préparait le dîner seule, elle fut surprise par un coup à la porte.

Elle ouvrit, souriant en voyant Brandon. « Salut Brandon, que puis-je faire pour toi ? »

« Ton père est là ? » demanda-t-il formellement, visiblement présent en tant que membre du conseil et non en tant qu'ami.

« Oui, il est dans sa tanière », haussa-t-elle les épaules avant de le conduire au bureau.

« Elena », cria John alors qu'elle fermait la porte, « mets un couvert pour Brandon. »

Elle soupira avant de retourner dans le couloir et dans la cuisine. Un peu plus tard, ils sortirent, parlant joyeusement de nouvelles concernant la colonie.

Elena leur sourit, souhaitant faire partie de la conversation avant de s'asseoir à table.

« Oh, ça a l'air délicieux Elena », sourit Brandon en prenant une grande cuillerée de soupe.

« Encore de la soupe, hein ? » grommela son père avant d'en prendre une grande cuillerée.

« C'est l'hiver, il n'y a pas grand-chose d'autre à faire », répondit-elle, avec un peu trop d'insolence dans la voix.

Son père lui lança un regard noir, visiblement mécontent de son attitude. Elle baissa les yeux, jouant nerveusement avec le bracelet que sa mère lui avait offert quand elle était jeune.

C'était un fin bracelet en argent orné de petites pierres blanches. C'était la seule chose qu'elle avait de sa mère et son bien le plus précieux.

Elle fit un signe d'au revoir à Brandon à la fin du dîner lorsqu'il partit, laissant la maison à nouveau silencieuse maintenant que son père était retourné dans son coin.

Elle se dirigea vers la porte de derrière et sortit, serrant son pull contre elle tandis qu'elle se tenait dans le froid.

« E ? »

Elena se retourna en souriant. « Salut », chuchota-t-elle avant d'étreindre Brandon. Il l'embrassa doucement sur les lèvres avant de reculer, gardant ses bras autour d'elle pour la réchauffer.

« Comment s'est passée ta journée ? »

« Comme d'habitude », se plaignit-elle. « J'ai juste attendu ici que ma vie commence vraiment. »

« Bientôt je deviendrai important ici et nous pourrons nous marier », dit Brandon en la serrant fort contre lui.

Elle esquissa un petit sourire avant de se tourner vers lui. « Pourquoi ne pas s'enfuir ? Toi et moi... on pourrait se faufiler et aller en Californie. J'ai entendu dire qu'il y avait une colonie là-bas... on pourrait... »

« Tu es folle ? C'est notre foyer. C'est le seul endroit où nous sommes à l'abri de ces bêtes. » Il recula, contrarié. « Ton père a dit que je pourrais bientôt devenir membre permanent du conseil. J'ai travaillé si dur pour ça, pour notre avenir. »

Elena baissa les yeux, remuant ses pieds dans la neige. « Je sais... c'est juste que... il est si indifférent. » Elle regarda la maison en pensant à son père. « Il ne remarquerait même pas que je suis partie jusqu'à ce qu'il ne reçoive pas son dîner. »

« C'est ton père, Elena », dit doucement Brandon.

« On ne dirait pas... », murmura-t-elle avant de se tourner vers lui. « Je ne veux pas me disputer à ce sujet. On se voit demain. » Elle se mit sur la pointe des pieds et l'embrassa sur les lèvres avant de rentrer.

Elle descendit le couloir et frappa doucement à la porte du bureau, l'ouvrant quand elle l'entendit émettre un son.

Elle l'ouvrit lentement, faisant un pas à l'intérieur. « Bonne nuit, père. »

« Bonne nuit », marmonna-t-il, les yeux toujours fixés sur son livre tandis qu'il se frottait le menton rugueux.

Elle esquissa un sourire crispé avant de monter dans sa chambre, le sentiment de solitude envahissant à nouveau la maison.