La balle qui frappe le plancher de la camionnette résonne comme un coup de tonnerre. Le bruit me vrille les tympans et me désoriente. Mon côté loup déteste ce vacarme.
Je reprends vite mes esprits. Mon loup bondit par-dessus le corps de ma mère. J'agrippe la tête de l'homme qui a tiré sur mes frères.
Je saute si fort que j'enfonce la porte arrière verrouillée. J'entraîne l'homme dans ma chute.
Nous roulons au sol et nous arrêtons à quelques mètres de la camionnette. Mon loup et moi sommes un peu sonnés en nous relevant lentement.
Nous desserrons notre prise en retrouvant l'équilibre. Au moment où je m'apprête à lui mordre la tête, un autre coup de feu éclate. Ma patte arrière me lance et saigne.
Mon loup et moi hurlons de douleur puis grognons de rage. Ce salaud m'a tiré dessus.
Il m'a tiré dessus !
S'il n'était pas mort avant, il l'est certainement maintenant !
Je referme violemment mes mâchoires, broyant son crâne. Du sang et de la cervelle jaillissent de ses yeux.
Tout devient silencieux autour de moi tandis que les membres de la meute s'enfuient, emmenant les blessés et mes parents à l'hôpital.
Mon loup est toujours furieux.
Nous sommes recroquevillés autour du cadavre, tenant toujours sa tête dans ma gueule. Du sang et des morceaux de crâne tombent goutte à goutte au sol.
Tout du long, nous grognons bruyamment, le poil hérissé par la colère. Mon sang se mêle à celui de l'homme mort sur le sol.
Je reste ainsi pendant environ une heure, comptant chaque goutte lente jusqu'à ce que je sente une main sur mon dos tendu. Je lâche la tête écrasée et tente de mordre la main.
« Zayla », dit une voix douce juste avant que mes crocs ne mordent leur peau, les faisant crier.
Quand je vois que c'est l'un de mes frères, je relâche sa main et pousse un gémissement triste. Nous nous sentons mal d'avoir blessé notre famille, la famille que nous essayons de protéger.
Laissant le cadavre derrière nous, nous traînons notre corps blessé vers Drayden, qui tient sa main ensanglantée.
Mon loup gémit sans cesse, plein de remords, et nous implorons son pardon.
Nous léchons le dessous de sa main, essayant de la soigner.
Nous continuons ainsi pendant plusieurs minutes, même si Drayden ne cesse de nous dire qu'il va bien et que ça ne fait pas mal.
Mon loup ne s'arrête pas. Elle se sent si coupable de l'avoir blessé qu'elle ne s'arrête pas avant que sa main ne guérisse.
Dès que c'est fait, il se penche à notre niveau. Il caresse ma tête, et je pousse un dernier gémissement triste avant de faire un son joyeux à son contact.
« C'est bon de te revoir, loup, on avait peur que tu sois parti. Je vois que tu t'es juste amélioré. »
Drayden continue de caresser mon loup tout en examinant notre nouvelle apparence avant de finalement se relever.
Il tapote ma tête une dernière fois, puis se dirige vers la maison. Je l'observe un moment, me demandant ce qu'il fait.
Quand il est à quelques mètres, il s'arrête et se retourne vers moi.
« Il est temps de laisser Zayla reprendre le contrôle et de rentrer à la maison, petit loup, tu ne crois pas ? »
J'acquiesce légèrement, puis me lève et boite vers mes vêtements - enfin, ceux de Soren.
Ils sont déchirés, ce qui m'attriste car je n'ai plus rien de lui maintenant. Mais je sais que je ne peux pas perdre de temps, alors je boite vers un autre arbre où je sais qu'il y a des vêtements cachés et je reprends forme humaine.
Je m'habille rapidement, entendant le bruit des feuilles tandis que mon frère suit le chemin que j'ai emprunté.
« Zayla ? Que fais-tu ? »
Je sors de derrière l'arbre au moment où il l'atteint.
« Zayla ? Petit loup ? » appelle-t-il à nouveau.
« Non, juste Zayla », dis-je d'un ton joyeux. Il se retourne, surpris d'entendre ma voix et encore plus surpris de voir mon visage après un si long mois.
Il me serre dans ses bras. « Dieu merci, tu es redevenue humaine. La maison commençait à sentir le chien mouillé. »
Il rit près de mon oreille, et je ne peux m'empêcher de rire en le repoussant. « Allez, monsieur le comique, aide-moi à aller à l'hôpital. Ma jambe me fait vraiment mal. »
Drayden baisse les yeux sur mon pantalon, maintenant couvert de sang. Ses yeux montrent de l'inquiétude un instant avant qu'il ne se penche et me soulève délicatement.
Nous parcourons le long chemin de retour vers la maison. Arrivés à l'hôpital, Drayden m'installe sur l'un des lits vides à côté de mes parents.
La tête de Draxel repose sur le corps de ma mère, mais il la relève quand on me dépose. Voyant le sang sur moi, il bondit et accourt.
« Que s'est-il passé ! » Sa voix tremble, pleine d'inquiétude.
« Le méchant m'a tiré dessus avant que je ne puisse le tuer, mais ça va. Tu peux arrêter de me regarder comme ça. »
« Quel regard », dit-il doucement.
« Celui qui dit que tu penses que je vais mourir », dis-je, essayant de détendre l'atmosphère, mais son visage s'assombrit davantage.
Je tends la main et prends celle de Draxel. « Qu'est-ce qui ne va pas, Drax ? »
Il se penche et m'embrasse doucement le front tandis qu'une infirmière de la meute s'approche et commence à examiner ma blessure. Je ne guéris pas car la balle est toujours dans ma jambe.
« Je suis juste si heureux de te voir », dit-il finalement en s'éloignant de moi, serrant légèrement ma main.
Je ne peux m'empêcher de lui sourire.
Regardez-moi ça. C'est mon frère. C'est le Draxel que je connais et que j'aime.
Alors que l'infirmière commence à fouiller dans ma jambe, je ne peux retenir un petit cri de douleur. Le visage de Draxel se crispe de colère, et il s'apprête à crier sur l'infirmière.
Je tends le bras et l'agrippe, le ramenant à mes côtés. « Drax, ça va. »
« Elle te fait mal exprès », dit-il avec colère, le grognement de son loup dans la voix.
« Non, ce n'est pas vrai. Je te promets que ça va, c'est juste un peu douloureux— »
Je m'interromps quand, du coin de l'œil, je vois un portail s'ouvrir. Le même homme du champ en sort et s'approche du corps d'un loup.
Les machines autour du loup commencent à émettre des bips sonores, indiquant que le guerrier sur la table est en train de mourir. Je regarde l'homme toucher le corps du loup, qui se met à briller doucement. Puis, il se retourne et retourne dans le portail.
J'agrippe à nouveau le bras de Draxel, pointant l'endroit où l'homme vient de disparaître.
« Tu as vu ça ? »
« Vu quoi ? »
« Cet homme, je crois... » Je cherche mes mots tandis que mon esprit tourne à toute vitesse. « Je crois que je viens de voir un faucheur. »
