
Je me cachai derrière la cabane, haletante. En me faufilant, je relevai ma jupe et me précipitai vers la cabane suivante, puis la suivante, regardant prudemment derrière moi pour m'assurer que je n'étais pas poursuivie.
« Où étais-tu ? » J'entendis une femme dire.
« Chez Martha, je voulais des conseils », répondit une autre femme
Je regardai dans leur direction. Derrière elles se trouvait une vieille cabane défraîchie, un peu inclinée, comme si elle appartenait à quelqu'un de plus âgé.
Je me glissai entre les cabanes pour me retrouver devant ce qui semblait être la cabane de Martha. Mais des griffes plantées dans mon épaule me firent pivoter brusquement. Quelqu'un me grogna dessus.
Je baissai la tête, me recroquevillant face à l'attaque soudaine. Mon dos fut violemment plaqué contre le tronc d'un arbre.
« Que fais-tu ici ? » C'était une femme, le visage déformé par la colère.
« Je suis juste venue parler à… » Je fis un geste vers la cabane de Martha.
« Non », coupa-t-elle sèchement. Elle posa son avant-bras sur mon cou.
Je cherchai du bout des doigts les chiffons pour cacher mon corps, inquiète qu'elle ait bougé ma coiffe ou mes vêtements. J'essayai de les maintenir en place.
Elle utilisa son autre main pour lisser ses cheveux bruns. « Que fais-tu dans ce camp ? »
« J'ai été poursuivie jusqu'ici. »
« Eh bien, chérie. Tu es venue au mauvais endroit. » Elle enfonça son coude dans ma gorge, appuyant fort.
Je suffoquai, j’abandonnai mes vêtements pour la saisir et lutter contre elle.
Je la griffai désespérément pour qu'elle libère mes voies respiratoires.
« Qu'est-ce qui se passe ici ? » aboya quelqu’un à travers le camp.
Je ne pouvais pas tourner la tête pour regarder. J'étais entièrement concentrée sur ce coude aiguisé qui appuyait sur ma gorge.
Soudain, la femme brune fut retirée de mon champ de vision. J’essayai de reprendre mon souffle alors qu'elle était soulevée du sol et retournée.
« Que fais-tu ! » rugit un homme en s’adressant à la femme.
« Elle ne devrait pas être ici ! Nous ne la connaissons pas. »
« Nous ne te connaissions pas non plus quand tu es venue ici, et pourtant je n'ai pas essayé de t'étrangler. » Ses yeux verts flamboyaient. Un homme presque identique se plaça à ses côtés.
Puis un autre se plaça entre moi et la scène. Il avait les mêmes cheveux noirs lisses.
Elle bafouilla, reculant face à sa rage.
« Je… je ne voulais pas la blesser », dit la femme en reculant.
Sa colère fit bondir mon cœur. Le pouvoir qu'il dégageait fit surgir des éclairs dans mon esprit. Je ne pouvais pas vraiment voir son visage, mais je savais qu'il était responsable de tout ce sang qui me hantait.
Mais la voix de la femme s'invita dans mes pensées torturées.
« Tu sais pourquoi. » Il la repoussa.
Je sentis leurs regards se tourner vers moi. Paniquée, je cherchai un endroit où me cacher.
Je fus tirée de côté par une main flétrie agrippant ma manche. Une vieille femme me guida dans la cabane. Elle ferma rapidement la porte en silence.
Je respirai lourdement. Je me laissai glisser contre le mur et cachai mon visage, sanglotant dans mes mains.
« La lune d’accouplement sera là dans quelques jours. Tu dois éviter les individus agressifs. »
« Comment puis-je savoir qui ils sont ? »
La vieille femme rit froidement. « Oh, tu sauras. »
Je pleurais plus fort.
Son ton s'adoucit. « Ce sont les mâles non accouplés », ajouta-t-elle.
Je fis un bruit pour indiquer que je comprenais et tentai de cesser de pleurer.
« Qui es-tu, ma chérie ? » La femme se pencha sur le côté pour mieux me voir dans la cabane sombre.
« Valerie. »
« Eh bien, ma chérie, il semble que tu as attiré l'attention des Faber. »
« Les Faber ? »
« Victor, Chase et Huntley. Ils sont parmi les plus féroces de la meute des Frontières. Il semble qu'ils aient jeté leur dévolu sur toi. »
« Pourquoi ? » Je resserrai ma cape.
« Je ne suis pas sûre. Mais ce que tout garçon désire, tous les trois le veulent aussi. »
« Je ne les connais pas. » Je ramenai mes genoux contre ma poitrine.
La femme ricana. « Tu penses que ça a de l'importance parmi les loups ? D’où viens-tu, ma douce ? »
« Je ne sais pas », avouai-je, bouleversée par cette vérité. « Je ne me souviens pas. »
Elle s'accroupit à côté de moi et posa une main sur mon épaule. « Eh bien, ma fille, tu vas devoir te montrer prudente avec ces mâles. Surtout à l'approche de la lune d’accouplement. »
« Qu'est-ce que c'est, la lune d’accouplement ? » demandai-je.
La vieille femme cligna des yeux. « Quand la lune rose se lève, elle rend les mâles fous de désir. Les plus calmes peuvent devenir agressifs. Ils sont tout aussi susceptibles de te tuer que de s'accoupler avec toi. »
J’ouvris grand les yeux, stupéfaite.
« C'est un moment sauvage, surtout quand aucun loup n'est apprivoisé », continua-t-elle. « Nos hormones à nous, les femelles, s'activent et bien que tu ne puisses le sentir, si tu te transformais en louve, les mâles seraient attirés, de très loin, guidés par la luxure. »
« Comment saurai-je quand ce moment sera proche ? »
« La lune sera rose et les mâles deviendront de purs animaux. Leurs loups courront à l'état sauvage et leur partie humaine sera quasi inexistante. Ils sont tout aussi susceptibles de te tuer que de s'accoupler avec toi. »
Je respirais difficilement.
« Alors, que dois-je faire ? »
« Reste dans ta cabane et barricade-la », avertit-elle. Son regard était grave. « Si tu devais être prise avec un petit à cause d'un accouplement, il serait beaucoup plus difficile pour toi de choisir un compagnon par toi-même. Tu n'aurais pas de protecteur. Notre alpha en choisirait probablement un pour toi. »
Mon estomac se noua. Mais quelque chose, une sorte de frémissement, me traversa le corps. Un soupçon de fureur monta en moi, me criant que je ne serais jamais forcée de faire quoi que ce soit.
Ses mots résonnaient en moi, mais ils semblaient aussi lointains, comme une partie de moi que je ne connaissais plus.
Alors que les voix à l'extérieur s'estompaient, la femme se présenta comme Martha. Elle alla chercher une tasse de thé et me l'offrit. La tasse chaude réchauffa mes doigts et me détendit un peu. Mais une vapeur presque nauséabonde d'herbes fétides s'échappait du liquide sombre.
« Merci. » Je m'efforçai de cacher ma grimace.
Martha tapota le dessus de la tasse en bois. « C'est pour éviter que tu ne donnes naissance à un petit après la nuit de la lune d’accouplement si tu n'es pas officiellement accouplée. »
« Ça m'empêchera de porter un petit ? » demandai-je, choquée, ignorant qu'une telle chose existait.
Martha hocha la tête solennellement, mettant un doigt sur ses lèvres. « Ne dis jamais aux mâles que nous faisons cela. Ils me tueraient. »
Je n'avais pas de mots. Ma tête me faisait mal avec tout ce qu'elle disait. Mais je ne voulais pas mourir sous la lune d’accouplement, alors je bus une gorgée du thé : c'était pire que l'odeur. Je bus le reste d'un trait pour en finir.
Je restai un peu plus longtemps avec Martha. Suffisamment avertie pour ne pas baisser ma garde, j'étais prête à retourner à ma cabane.
Elle regarda par la fente de sa porte jusqu'à être sûre que la femme qui m’avait agressée et les frères Faber n'étaient plus en vue.
Je me précipitai dehors, trébuchant et me rattrapant aussi maladroitement qu'un jeune faon. Je me dépêchai le long du chemin étroit à l'arrière des cabanes, mais je m'arrêtai en entendant la voix tonnante de l'alpha s'élever au-dessus de la foule.
Cet homme dégageait du pouvoir, chacun de ses mots rayonnait de violence et de défi.
J'osai jeter un coup d'œil autour de la cabane et le vis debout sur une bûche, déclarant ses ordres à la foule.
« Il y aura des accouplements, pas juste des reproductions, sous cette lune d’accouplement. Même Alana et Katy devront être accouplées, si elles se reproduire. » Il désigna deux femmes.
Je reconnus l'une d'elles comme la femme qui m'avait attaquée. Bien que maintenant, sans la rage qui déformait son visage, elle semblait bien plus jolie. Mais pour moi, elle resterait à jamais laide.
Je me promis qu'elle ne me surprendrait plus jamais seule. Bien que je ne comprenne toujours pas entièrement ce qui avait déclenché sa fureur.
« Si vous désirez une femelle dans cette meute, vous vous accouplerez sous cette lune, ou quelqu'un d'autre le fera. Ce n’est pas que moi, votre alpha, qui l’ordonne. C'est l'héritage de notre meute qui le veut. Les petits prolongeront nos lignées et garderont notre meute en vie. »
« Oui ! Bravo ! » Il y eut des cris d'encouragement à cela.
La meute assemblée rugit d'approbation, approuvant sa déclaration.
J’avais l’estomac retourné.