L'Alpha d'Emmeline

Emmeline referma le vieux livre emprunté à la bibliothèque. Elle se leva du sol froid en bâillant. Sa chambre au sous-sol était humide, et s'asseoir sur le carrelage glacé lui faisait mal partout.

Elle s'étira et éteignit la lumière. Puis elle se glissa dans son lit usé et déchiré. Le vieux matelas grinça sous son poids.

Son petit corps se blottit confortablement dans l'étroit lit. Elle soupira et se recroquevilla, remontant sa fine couverture jusqu'au menton.

Elle repensa aux histoires qu'elle venait de lire. L'Alpha Gideon Steel était célèbre parmi les loups. Emmeline croyait aux récits à son sujet, et il lui faisait peur.

Tout le monde le craignait, mais Emmeline était aussi intriguée par lui.

Elle bâilla à nouveau. Le lendemain était un grand jour. L'Alpha avait convoqué tout le monde, et Emmeline était heureuse de pouvoir enfin sortir après si longtemps. Bientôt, elle s'endormit.

De bon matin, Emmeline se tenait en ligne avec sa belle-mère et ses deux demi-sœurs, Loretta et Lauren. Elles portaient de jolies robes.

Emmeline avait revêtu la robe de sa mère. Sa couleur bordeaux mettait en valeur ses yeux verts et son teint de porcelaine.

Elle avait brossé ses cheveux noirs qui cascadaient dans son dos. Elle avait pincé ses joues pour leur donner un peu de couleur. Sa belle-mère lui interdisait le maquillage.

L'Alpha apparut au sommet de la colline. Il avait la trentaine et n'avait pas encore trouvé sa compagne. Trouver son compagnon destiné était crucial, mais pas une mince affaire. De nombreux loups cherchaient pendant des années avant de rencontrer leur moitié.

Les loups pouvaient devenir sauvages s'ils restaient trop longtemps sans compagne. Ainsi, ils voyageaient souvent, quittant leur meute un temps, à la recherche de leur autre moitié.

La belle-mère d'Emmeline ne voulait pas qu'elle trouve son compagnon. Le père d'Emmeline était mort quelques années plus tôt, la laissant avec sa belle-mère et ses deux demi-sœurs.

Sa belle-mère voulait qu'Emmeline s'occupe d'elle, même après le mariage de ses propres filles. Pourquoi Emmeline restait-elle, alors qu'elle était assez âgée pour partir ? Elle n'avait nulle part où aller.

« N'ayez crainte... » L'Alpha commença à parler, mais Emmeline cessa d'écouter. Elle repensait à l'histoire de l'Alpha Steel qu'elle avait lue la veille.

Elle aurait préféré ne pas avoir à assister à ces événements. Elle aurait pu passer son temps libre à lire ses livres préférés. Elle avait rarement l'occasion de profiter de moments de tranquillité.

Emmeline recommença à prêter attention lorsqu'elle entendit un hoquet à côté d'elle. Elle vit que l'Alpha avait fini de parler et que tout le monde s'était retourné pour regarder la colline.

L'atmosphère avait changé. Elle était devenue sombre, froide et inquiétante. Même le soleil ne parvenait pas à la réchauffer.

Un instant plus tard, quatre énormes loups apparurent au sommet de la colline. Tout le monde hoqueta, et beaucoup eurent peur. Sa belle-mère et ses demi-sœurs se cachèrent derrière Emmeline.

Emmeline observa le plus grand des loups tandis qu'ils s'approchaient de l'Alpha. Quel qu'il soit, sa forme de loup noir imposant était terrifiante. Il dépassait de loin les autres en taille.

Le regard froid et colérique dans ses yeux aurait pu la glacer d'effroi. Elle le regarda marcher lentement le long de la file de loups.

Sur un bref signe de tête du grand loup, qu'elle supposait être leur Alpha, ils sortirent du rang et commencèrent à se diriger vers Emmeline et sa famille.

Lorsqu'il fut à quelques pas d'Emmeline, il s'arrêta. Il leva le museau et huma l'air. Un grondement effrayant monta de sa poitrine.

Tout le monde sursauta tandis qu'il cherchait l'origine de l'odeur qui avait attiré son attention.

Il s'approcha d'Emmeline. Bientôt, il se tenait devant elle. Elle plongea son regard dans le sien. Quelque chose remua en elle, et sa louve se sentit extatique.

Elle ne pouvait détacher ses yeux de lui. Il avait les plus beaux yeux, d'un gris sombre parsemé de vert clair.

Leur connexion instantanée et les émotions intenses qui l'envahissaient la poussaient à continuer de le fixer.

Emmeline se mordit la lèvre et bougea légèrement en sentant une chaleur dans son ventre et entre ses jambes. Elle le regarda la humer, et ses yeux virèrent au noir.

Son corps frissonnait, lui révélant ce qu'elle avait besoin de savoir. C'était son compagnon. Il l'emmenait dans sa meute.

Il leva la tête et hurla. En quelques secondes, ses loups encerclèrent Emmeline. Sa belle-mère et ses demi-sœurs furent repoussées. Elles regardèrent ses loups la pousser vers son Alpha.

« Est-ce elle ? » demanda l'Alpha d'Emmeline. Un aboiement court et sec lui répondit, et l'Alpha d'Emmeline la regarda tristement avant d'acquiescer.

Il n'y eut pas le temps de se changer ou de changer. Elle fut jetée sur le dos de l'autre Alpha et enroula ses bras autour de son cou pour ne pas tomber. Un grondement de sa poitrine lui indiqua qu'il appréciait la sensation de son corps contre le sien.

« Attendez ! » cria la belle-mère d'Emmeline. Tout le monde se tourna vers elle. La belle-mère d'Emmeline, Abigail Tremaine, se tenait là, droite, ses cheveux blonds tressés sur son épaule.

Elle pointa Emmeline du doigt avec colère. Sa fureur lui donnait l'audace de s'adresser à l'Alpha, ce qui déplut au compagnon d'Emmeline.

Il grogna et montra les crocs, menaçant. Elle sentit son corps se tendre, prêt au combat.

« Vous ne pouvez pas l'emmener, dit Abigail. Elle m'appartient. »

Un grondement puissant s'échappa du nouveau compagnon d'Emmeline. Il n'appréciait pas l'insolence de sa belle-mère. Ses loups commencèrent à avancer vers la belle-mère d'Emmeline, découvrant leurs crocs.

Abigail faillit tomber en reculant précipitamment.

« Arrêtez, ordonna l'Alpha d'Emmeline. Partez. Vous avez obtenu ce que vous vouliez. Ne blessez pas les membres de ma meute. »

Les trois loups s'arrêtèrent et attendirent les ordres de leur Alpha.

« S'il te plaît, laisse-les partir », chuchota doucement Emmeline à l'oreille de son compagnon. Elle sentit son corps se détendre, et il acquiesça avant de grogner à nouveau. Ses loups revinrent se placer à ses côtés avant de s'élancer.

Ils coururent pendant des heures. Le soleil commençait à décliner lorsque l'estomac d'Emmeline gargouilla. Son compagnon aboya, et ils ralentirent avant de s'arrêter près d'un ruisseau.

Son compagnon lui fit signe de descendre de son dos. Quand il vit qu'elle était debout, il s'enfonça plus profondément dans les bois.

Les autres loups s'allongèrent autour d'elle, la tête sur leurs pattes. Elle remarqua leur façon de la regarder, et ses joues s'empourprèrent.

Elle se demanda pourquoi ils ne reprenaient pas leur forme humaine. Emmeline s'assit et regretta de ne pas avoir écouté le discours de son Alpha. Elle était partie avec son compagnon, mais elle ignorait qui il était.

Trente minutes plus tard, son compagnon revint avec un cerf qu'il venait de tuer. L'un des loups se leva et alla derrière un arbre.

Il revint sous forme humaine, vêtu d'un short noir et d'un t-shirt blanc. Il était aussi imposant que son loup, avec des cheveux blond doré. Ses yeux croisèrent les siens, et il sourit.

« Bonjour, Luna, dit-il. Je m'appelle Drake. Je suis le Gamma de cette meute. »

Emmeline lui sourit timidement. « Enchantée, Drake. Je m'appelle Emmeline, mais tu peux m'appeler Em. »

Un grognement menaçant s'échappa de son compagnon alors qu'il s'allongeait à côté d'elle, toujours sous forme de loup. Drake regarda son Alpha avant de secouer la tête.

« Luna, c'est parfait, dit-il rapidement. Avez-vous faim ? »

Elle hocha la tête et se lécha les lèvres avec appétit. La poitrine de son compagnon gronda, et elle se tourna vers lui. On aurait presque dit qu'il boudait. Emmeline se demanda pourquoi, tandis que Drake allumait un feu et faisait cuire la viande sur les flammes.

Dix minutes plus tard, il lui tendit une brochette de viande chaude. Emmeline la mangea avec plaisir. C'était délicieux, mais elle n'était pas habituée à manger autant.

Quand elle vivait chez sa belle-mère, elle ne mangeait que les restes. Elle fronça les sourcils en voyant la viande en trop. Elle ne voulait pas la gaspiller.

Lentement, elle tendit le morceau savoureux vers son compagnon. Il parut surpris qu'elle lui offre de la nourriture, mais après un moment, il commença à manger.

Quand ils eurent fini, le compagnon d'Emmeline se leva et lui fit signe de remonter sur son dos.

Drake s'était déjà retransformé en loup et attendait avec les autres. Emmeline essaya de sauter mais ne prit pas assez d'élan, tombant sur les fesses.

Son compagnon émit un son ressemblant à un ricanement, et elle le fusilla du regard. Il s'accroupit pour qu'elle puisse grimper. Une fois installée, les loups se remirent à courir.

Elle ne comprenait pas pourquoi il ne la laissait pas changer et courir avec eux. Mais elle ne se plaignait pas de chevaucher son dos. Elle était fatiguée, et ne pas avoir à courir était agréable.

Sa belle-mère ne lui avait pas souvent permis de se reposer.

Le soleil avait presque disparu, et Emmeline se demandait s'ils atteindraient un jour le territoire de son compagnon. Ils avaient parcouru une longue distance et s'étaient à peine arrêtés pour se reposer, juste pour manger ou faire leurs besoins.

Pourtant, ils continuèrent à courir bien après que le soleil se fut complètement couché. La lune était la seule lumière dans un ciel sombre parsemé d'étoiles.

Emmeline bâilla et se blottit dans la fourrure de son compagnon, laissant son odeur masculine et le doux mouvement de sa course la bercer jusqu'au sommeil.

Lorsqu'Emmeline se réveilla, elle fut surprise de se retrouver dans un grand lit, enveloppée dans des draps doux. Elle bâilla à nouveau et s'étira, heurtant quelqu'un à côté d'elle.

Elle fronça les sourcils. Puis elle sentit quelque chose autour de sa taille. En baissant les yeux, elle vit un bras musclé et tatoué enroulé autour d'elle. Elle ne portait plus sa robe non plus.

À la place, elle avait un grand t-shirt blanc. Elle se retourna pour faire face à la personne derrière elle. Lentement, elle parcourut du regard un corps masculin puissant, de son torse à son cou, puis à son visage.

Elle eut le souffle coupé. L'homme qui la tenait était l'Alpha Gideon Steel. Des cicatrices couvraient le côté gauche de son visage, mais il restait incroyablement séduisant. Elle n'avait jamais vu un homme aussi beau.

Il avait des lèvres pleines qui lui inspiraient des pensées coquines. Pour la première fois, Emmeline se demanda ce que ça ferait d'embrasser quelqu'un.

Ses cheveux argentés étaient ébouriffés autour de son visage. Elle leva le bras et passa ses doigts dedans.

Émerveillée, elle savoura la douceur de ses cheveux. Quand elle baissa à nouveau les yeux, elle le vit éveillé, en train de la regarder. Elle retira vivement sa main.

« T-tu es réveillé, balbutia Emmeline. J'étais juste... »

Il ne dit rien. Il se contenta de l'observer attentivement.

Soudain timide, elle essaya de se lever, mais il la serra plus fort, la ramenant contre son torse musclé. Il plaça sa tête sous son menton.

Elle resta immobile tandis qu'il la tenait serrée contre lui. Après quelques instants, la chaleur de son corps la fit à nouveau sombrer dans le sommeil.