La Grande Évasion - Couverture du livre

La Grande Évasion

Anna Pope

Vanille et fraise

Milo

Quand j’eus réussi à calmer Lucas, il insista pour partir en patrouille. J'étais sûr qu'il n'allait pas pouvoir rester là sans stresser à propos de Rafa, alors je l’autorisai à partir.

Après son départ, je retournai à la maison et décidai de passer un peu de temps à examiner la paperasse qui s'entassait depuis deux jours.

Je détestais vraiment cette tâche, car c'était elle qui s'occupait de tout cela depuis qu'elle était devenue luna. Mais comme elle n'était plus là, c'était moi qui devais m'en charger.

Au bout d'une heure ou deux, les portes du bureau s’ouvrirent d’un seul coup et un petit bolide rouge de colère les franchit à toute allure.

« Milo ! » cria-t-elle avant de sauter sur mes genoux et d'enrouler ses petits bras potelés autour de mon cou. Je râlai un peu sur le moment, mais je la serrai dans mes bras à mon tour.

« Bonjour Elisa », dis-je à la petite rousse qui essayait de m'étouffer.

Pour une petite fille de quatre ans, elle était incroyablement forte. Elle gloussa et leva ses grands yeux bleus innocents.

« Bonjour Milo ! Tu m'as manqué », répondit Elisa, et même si j'essayai de le retenir, un petit sourire se glissa sur mes lèvres. J'aimais bien cette petite casse-pieds.

Elle était l'une des rares à se comporter encore avec moi comme elle le faisait avant, et non comme si j'allais l’assassiner dans son sommeil si elle disait une seule chose de travers.

Bien sûr, elle était bébé quand tout était parti en vrille, donc elle ne me connaissait pas vraiment avant, mais c'était quand même bien de ne pas être traité comme un monstre.

« Toi aussi, tu m'as manqué, Elisa. Tu t’es bien amusée pendant ton voyage ? » lui demandai-je.

Son visage afficha instantanément une petite moue. « Non, je les déteste. Ils sont méchants », murmura-t-elle.

Je haussai immédiatement les sourcils. « Tu détestes ton oncle et ta tante ? »

Elle acquiesça rapidement de la tête et serra ses petites mains en poings le long de son corps.

« Pourquoi ? Ils ont dit ou fait quelque chose qui t’a mise en colère ? »

Elle baissa les yeux tristement, évitant mon regard, et hocha la tête. « Je les ai entendus dire des choses méchantes sur toi », chuchota-t-elle de façon presque inaudible, mais je parvins à l'entendre.

Ce qu'elle me disait me fit froncer les sourcils.

Sa tante s'était accouplée avec le bêta d'une meute rivale il y a quelques années, et avait été envoyée là-bas lorsqu'ils s'étaient mariés. Connor, l'oncle d'Elisa et bêta de la meute, n'était pas un de mes fans, loin s'en faut, car il y avait beaucoup de rancœur entre nous.

Il n'était donc pas du tout surprenant qu'il dise du mal de moi. Mais sa tante, Hannah, était l'une de mes meilleures amies avant, et entendre dire qu’elle faisait la même chose m'était douloureux.

Nous avions perdu contact au fil des ans, puisqu'elle se trouvait à l'autre bout du pays, mais je l'aimais toujours comme une sœur. Entendre qu'elle n'avait plus le même amour pour moi me faisait mal, même si je ne le montrerais jamais.

« Qu'est-ce qu'ils ont dit pour que tu leur en veuilles à ce point, petite espionne ? » lui demandai-je même si, connaissant Connor, je pouvais déjà imaginer la réponse.

« Mon oncle a dit que tu étais un monstre et un dé...désho… »

« Déshonneur ? »

« Oui ! C’est ça ! Un déshonneur pour notre meute parce que tu es faible. Maman et Papa ont dit que ce n'était pas vrai et qu'ils t'aimaient bien, mais tante Hannah a dit qu'elle était d'accord avec son partenaire.

Je lui ai dit qu'elle était stupide, et ensuite mon oncle a commencé à me crier dessus parce que j’avais dit ça. Alors on est partis de chez eux et on est rentrés. Fin. »

Il me fallut faire un énorme effort pour ne pas rire de son histoire. J'imaginais la petite rousse se disputer et essayer de me défendre alors qu'elle était à peine plus grande qu'un bébé, et que son oncle était un géant.

Ce que Connor avait dit était exactement ce à quoi je m'attendais de la part de cet homme, puisque je l'avais entendu le dire en personne un certain nombre de fois. Le fait qu'Hannah soit d'accord avec lui était une surprise.

Elle avait toujours été de mon côté, surtout quand tout était parti en vrille il y a quelques années. Mais je me disais qu'après avoir été accouplée à Connor, ses sentiments avaient changé.

Dire que j'étais déçu serait un euphémisme, mais il n'y avait plus rien à faire. Si elle voulait être aussi conne que Connor, c'était son choix. J'avais cessé de me soucier de l'opinion des autres depuis longtemps.

***

Le reste de la journée s'écoula dans un flou de paperasse et d'appels à d'autres meutes pour essayer de savoir s'ils avaient des informations sur Rafa.

Cela s'était avéré inutile au bout du compte, comme je le craignais. J'étais sûr que Rafa ne partirait pas de lui-même, et j'avais raison. C'était un jeune heureux, aimé de tous les membres de la meute. Il n'avait aucune raison de s'enfuir.

Ça devait être les Chasseurs. L'idée qu'ils aient pu s'emparer de ce gentil garçon et lui faire subir toutes sortes de choses ignobles me faisait bouillir le sang.

Je détestais leur espèce de toutes mes fibres, et si je parvenais à mettre la main sur ceux qui avaient enlevé Rafa, ils maudiraient le jour de leur naissance.

Mon loup était agité. Je le sentais faire les cent pas au fond de mon esprit, comme s'il attendait quelque chose. J'essayais de l'amadouer pour qu'il me parle, mais il restait anormalement silencieux.

J’entrai dans la douche dans l'espoir de calmer mon anxiété croissante. Je détestais ne pas savoir ce qui allait se passer, et le fait qu'Igor soit comme il l'était à ce moment-là ne faisait qu'accroître mon malaise et ma nervosité.

Dès que j'eus terminé et que j'eus enfilé mon pantalon, j'entendis une cacophonie de voix à travers le lien mental.

« Alpha ! C'est Rafa ! Il est revenu ! » cria Lucas, la voix pleine d'excitation.

« C'est génial, Lucas ! Où était-il ? Est-ce qu'il va bien ? Blessé ? » demandai-je en quittant rapidement l'appartement et en courant jusqu'au premier étage.

« Oui, il va bien. Quelques bleus ici et là, mais il vivra. Il a réussi à échapper aux Chasseurs et a ramené une amie. Une amie humaine. »

Ces mots m’arrêtèrent dans mon élan et je réussis de justesse à ne pas tomber. Mais qu'est-ce qui se passe ?

« Nous serons là dans deux minutes, Alpha », dit Lucas.

J'accélérai le pas, je franchis la porte de derrière et sortis dans la cour.

Dès que je fus dehors, je vis la meute à l’entrée de la cour, venant vers moi avec Lucas et Rafa à sa tête. Le soulagement m'envahit quand je vis le garçon en sécurité dans les bras de son frère, et avec un immense sourire sur le visage.

Puis soudain, une odeur des plus enivrantes parvint jusqu’à mon nez, me figeant sur place. C'était un mélange parfait de vanille et de fraise qui me frappa de plein fouet. Je trébuchai, tombant presque face contre terre.

« Alpha ? » entendis-je Lucas demander à travers le lien, visiblement inquiet pour moi.

Je secouai la tête, essayant de faire le vide dans mon esprit alors qu'ils se rapprochaient puis s'arrêtaient devant moi. L'odeur devenait de plus en plus forte, et à ce stade, je crus que j'allais mourir à cause de la surcharge de sensations qui m'envahissaient.

Et puis je l'aperçus, la plus belle fille que j'aie jamais vue, qui passait une tête derrière Rafa.

« Partenaire ! » grogna Igor dans ma tête, et je faillis m'évanouir.

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