Cœur de Pierre du Cowboy

Zadie avait débarrassé la table de la cuisine pour que les garçons puissent manger. Une cafetière et des tasses étaient posées sur la table. Quand les garçons descendirent, elle s'essuya le front avec un torchon.

Elle s'installa à table avec eux et se servit un café.

"Bon, les gars, faut qu'on parle. J'ai passé plus de deux heures à récurer le four et la cuisinière. Il me faudra toute la nuit pour finir la cuisine. Et sûrement deux-trois jours pour le reste de la baraque. Alors on va mettre quelques règles en place.

"D'abord, quand vous rentrez, vous enlevez vos bottes à l'entrée. Après manger, vous jetez les restes et vous mettez la vaisselle dans l'évier.

"Arrêtez de balancer vos fringues partout. Mettez le linge sale dans le panier avec les serviettes.

"Remettez les bouteilles de bière vides dans la caisse sur le perron. Mais dites-moi un truc : comment ça a pu devenir un tel bordel ici ?"

"Ben, on sait pas trop faire le ménage. Et on bosse tellement au ranch qu'on est crevés en rentrant.

"Tout ce qu'on veut, c'est manger et boire quelques bières avant d'aller au pieu," répondit Lee pour tout le monde.

Elle soupira. Ils la regardaient tous avec de grands yeux. "D'accord, je peux comprendre, vu que vous êtes jeunes et célibataires.

"Je vais remettre la maison en état, mais va falloir m'aider aussi. Je m'attends pas à ce que vous fassiez la cuisine et le ménage, c'est mon boulot. Mais suivez juste les quelques règles que j'ai données. Vous pouvez faire ça pour moi ?"

"Oui m'dame," dit Rory, et les autres acquiescèrent.

Elle leur fit un grand sourire. "Merci. On commencera les nouvelles règles demain, une fois que j'aurai tout nettoyé."

"On peut prendre une bière et aller dehors ?" demanda doucement Cody.

"Allez-y." Quand ils sortirent avec leurs bières, elle resta assise à finir son café en souriant. Même s'ils avaient la vingtaine, ils étaient comme des gamins à bien des égards.

Elle se demandait ce qui était arrivé à leurs parents et quel âge ils avaient quand ils les avaient perdus. Mais elle voulait pas demander et se disait qu'ils finiraient par lui en parler.

Le temps qu'elle finisse de nettoyer la cuisine, les gars étaient montés se coucher et elle était vannée.

Demain, fallait qu'elle s'occupe du reste de la maison, mais pour l'instant, elle voulait juste prendre une bonne douche et aller au lit.

Elle savait aussi qu'elle devrait se lever aux aurores pour leur préparer le petit-déj et le café.

En allant dans la chambre qu'on lui avait filée, elle se déshabilla et fila sous la douche.

Elle avait vu des fringues d'homme dans le placard et la commode, et un rasoir, de la mousse à raser et une brosse à dents dans la salle de bain. Elle savait qu'un des gars avait dû lui laisser sa chambre.

Elle avait l'impression de s'être à peine endormie quand il fallut se lever ; le soleil était même pas encore levé.

Elle enfila vite fait des fringues et descendit préparer le café et le petit-déj. Elle venait juste de finir les œufs brouillés, le bacon et le café quand elle les entendit descendre.

"Salut les gars. Le petit-déj est prêt, installez-vous."

"Waouh, ça sent super bon et ce café, il a jamais été aussi bon," dit Rory en buvant son café.

Elle sourit en les regardant engloutir ce qu'elle avait préparé et vider la cafetière.

"Brock rate vraiment de la bonne nourriture et la cuisine a l'air nickel," dit Lee.

Elle se tourna vers lui. "C'est qui Brock ?"

Les trois gars se levèrent d'un coup, attrapant leurs assiettes vides pour les mettre dans l'évier.

"Désolé, faut qu'on file, à plus tard," dit Rory en poussant ses deux frères dehors.

Elle trouva bizarre qu'ils se précipitent dehors quand elle avait demandé qui était Brock, mais elle se dit que ça devait être un pote à eux.

Elle passa toute la journée à nettoyer, en commençant par la salle de bain du rez-de-chaussée.

Elle fut choquée de voir le bordel ; la baignoire et le lavabo étaient dégueulasses, et y avait des fringues et des serviettes mouillées partout par terre.

Il lui fallut plus d'une heure pour bien nettoyer la salle de bain ; elle ramassa tout le linge sale et les serviettes pour les mettre dans la machine à laver.

Une fois cette pièce propre, elle s'attaqua au salon ; c'était une grande pièce avec deux canapés, trois fauteuils et une grande télé à écran plat.

À part la poussière et les fringues qui traînaient, c'était pas si mal, et il ne lui fallut pas plus d'une heure pour tout nettoyer.

Avant de s'occuper des autres pièces, elle mit un rôti au four avec des patates et des légumes.

On lui avait dit que les gars rentraient d'habitude pour le déjeuner, mais ce jour-là, ils devaient déplacer une partie du bétail et ne rentreraient pas avant le dîner.

Quand les gars rentrèrent, elle avait mal partout et était crevée. Il lui restait encore la buanderie à nettoyer et le linge à finir, mais elle décida qu'elle en avait assez pour aujourd'hui et finirait demain.

Quand les trois gars entrèrent dans la cuisine avec leurs bottes, elle s'éclaircit la gorge. "Les gars, qu'est-ce que j'ai dit pour les bottes ?"

"Oups, désolé," dirent-ils en retournant sur le perron. Ils enlevèrent leurs bottes avant de revenir.

Après leur avoir servi leur repas, elle s'assit avec eux pour manger. "Alors, comment s'est passée votre journée ?"

"Ça allait, mais c'était une longue journée. M'dame, ce rôti est délicieux. D'habitude, on ouvre juste une boîte de haricots et on coupe des hot-dogs dedans avec du pain. Aucun de nous sait vraiment bien cuisiner."

Elle leur sourit. "Merci, je suis contente que ça vous plaise mais appelez-moi Zadie. J'espère que vous aimez la tarte aux pommes parce que j'en ai fait une pour le dessert."

Quand ils eurent fini de manger, elle fut ravie de voir que chacun apporta son assiette vide à l'évier.

"Zadie, on va au bar ce soir boire un coup, vous voulez venir avec nous ?" demanda Cody avant de monter se changer.

"C'est gentil de proposer, mais j'ai encore plein de boulot et je suis un peu crevée, alors peut-être une autre fois."

Après leur départ, elle finit la vaisselle, termina le linge et posa leurs fringues propres sur leurs commodes dans les chambres.

Elle descendit ensuite, se servit une tasse de thé et alla s'asseoir dans le salon.

Elle alluma la télé, mais son regard fut attiré par les photos sur la cheminée. Elle se leva pour les examiner de plus près.

Il y avait une photo d'un couple plus âgé et de trois petits garçons d'environ quatre ans qu'elle pensait être les triplés.

Elle se dit que ça devait être les parents des garçons, mais il y avait un autre gamin sur la photo ; il semblait avoir dans les douze-treize ans.

Plein de questions lui traversèrent l'esprit. Peut-être que leurs parents étaient morts, dans un accident, et que cet autre garçon était leur frère qui aurait pu être avec eux.

Même si elle était curieuse, elle ne voulait pas demander au cas où ce serait un sujet sensible. Pour l'instant, elle laisserait tomber et espérait qu'un jour elle connaîtrait la vérité.

***

Pendant deux jours, Zadie avait cuisiné et nettoyé jusqu'à ce que toute la baraque soit nickel. Et avec l'aide des gars, ça rendait son boulot un peu plus facile pour qu'elle puisse souffler.

Elle en arriva au point où elle tenait plus debout, alors elle monta se préparer pour aller au lit.

Elle était même trop crevée pour prendre une douche et décida qu'elle en prendrait une le matin ; elle ne mit même pas de chemise de nuit.

Dès que sa tête toucha l'oreiller, elle s'endormit comme une masse et dormit d'une traite.

***

Il était tard quand Brock arriva à cheval au ranch. Il avait chaud, était crevé et avait la dalle. Il descendit de cheval et enleva la selle.

Puis il s'assura que le canasson avait de quoi boire et manger avant de le mettre dans la grange et d'entrer dans la maison.

Quand il franchit la porte, il fut surpris de voir que c'était nickel. Rien ne traînait.

Il alla à la cuisine pour prendre une bière et peut-être grignoter un truc mais s'arrêta net en arrivant à la porte. Il regarda autour de la petite cuisine et n'en crut pas ses yeux.

C'était impeccable aussi. Même le frigo et la cuisinière brillaient. "Les gars ont vraiment bien fait d'embaucher une femme de ménage," se dit-il en ouvrant le frigo et en prenant une bière. Il vit alors les restes du rôti.

Il les sortit, en mit un peu dans une assiette et les réchauffa au micro-ondes. Quand il eut fini de manger, il mit son assiette dans l'évier.

Il faisait toujours ça, même si ses frères étaient différents et les laissaient traîner n'importe où.

Même s'il était crevé, au lieu d'aller se coucher, il prit sa bière dehors et s'assit sur le perron. Les chevaux de ses frères n'étaient pas là, alors il savait qu'ils étaient encore au bar.

Un truc qu'il devait reconnaître à ses frangins, c'est que peu importe combien ils picolaient ou à quelle heure ils rentraient, ils se levaient toujours pour aller bosser.

Ils ne s'attendaient pas à ce qu'il rentre avant demain ou après-demain, mais il avait trouvé un acheteur pour le bétail dès son arrivée aux enchères. Il finit sa bière et rentra pour monter dans sa chambre.

Arrivé là-haut, il n'alluma pas la lumière. Il avait une veilleuse dans la salle de bain, et c'était juste assez pour qu'il trouve son chemin jusque-là. En entrant, il ferma la porte derrière lui et se déshabilla.

Voyant le panier à linge, il y mit ses fringues sales, ouvrit l'eau de la douche et se glissa dessous.

Oh putain, il était vraiment naze. Ç'avait été un sacré voyage aller-retour. Tout le long du chemin du retour, il était en rogne en pensant au bordel qu'il trouverait en rentrant.

C'était toujours le bazar, mais avec son absence, ce serait sûrement pire.

Mais dès qu'il était entré dans la baraque, il s'était senti mieux en voyant à quel point c'était propre, et il était vraiment fier des triplés d'avoir embauché quelqu'un qui savait y faire.

C'était pas souvent que ses frangins faisaient un truc bien, mais quand ça arrivait, il s'assurait toujours de leur dire qu'ils avaient assuré.

Il avait hâte de savoir qui ils avaient embauché. C'était un truc qu'il aurait dû faire lui-même y a longtemps.

Y avait plein de bonnes femmes en ville qui s'étaient proposées, des vieilles à la retraite qui avaient rien à foutre, mais il avait toujours dit non.

Il n'aimait juste pas l'idée que quelqu'un vienne chez eux. Il tenait à son intimité, mais ça en était arrivé au point où il supportait plus le bordel.

Il se sécha et mit la serviette sur le porte-serviettes pour sécher, puis éteignit la lumière. Ensuite, il se mit au pieu à poil. L'endroit où son lit était placé était sombre, et il ne remarqua même pas qu'il y avait quelqu'un sous les couvertures.

Il dormait toujours du même côté, et c'était un très grand lit. Allongé sur le côté, dos à l'autre personne, il ferma les yeux et en quelques minutes, il pionçait comme un loir, sans se douter de ce qui l'attendait le lendemain matin.