Laila Callaway
LEILANI
Le soleil me réveille, ma chambre est baignée de lumière, même avec les rideaux fermés. Je me retourne et regarde l’heure sur mon téléphone : 8 h 4. Je me redresse et m’étire avant de sortir du lit.
J’ai fait deux pas vers la porte avant de me rendre compte que je pouvais voir.
Je peux tout voir !
Ma vue est complètement revenue. Tout est clair et net.
Remontée à bloc, j’ouvre la porte de la chambre et je cours dans le couloir, jusqu’à la chambre de mes parents. Je frappe à la porte à plusieurs reprises jusqu’à ce que j’entende ma mère crier « Entrez ».
Je m’engouffre à l’intérieur pour la voir sortir de la salle de bain, enveloppée dans une grande serviette.
« Maman ! Je peux voir ! » m’exclamé-je, joyeuse. Et, un sourire se dessine sur son visage.
« Oh, ma chérie, c’est incroyable », jubile-t-elle avant de me prendre dans ses bras. Nous nous serrons l’une contre l’autre pendant un moment, puis elle recule pour regarder mes yeux.
« Ils ont l’air parfaitement guéris, c’est génial. Tu devrais descendre le dire à ton père », suggère-t-elle.
Je me précipite dans les escaliers et ouvre la porte de son bureau, sans frapper. Je considère brièvement que les Alphas pourraient être avec lui, mais je m’en moque.
Mon père est avec mon frère. Il est derrière son bureau avec Akamai appuyé contre le mur. Je leur dis pour ma vue et ils m’embrassent tous les deux.
J’envoie un SMS à Damon pour lui annoncer la bonne nouvelle et je remonte à l’étage pour m’habiller. Maintenant que je suis plus heureuse, j’enfile une petite robe et des sandales.
Je brosse mes cheveux et, pour la première fois, depuis ce qui me semble être une éternité (mais en réalité, ça ne fait que quelques jours), je me maquille un peu.
Je descends pour le petit-déjeuner et je suis déçue de constater que les Alphas ont déjà mangé et sont partis courir. Je voulais voir à quoi ils ressemblaient.
Après avoir mangé et m’être lavé les dents, je retourne à la bibliothèque. Je peux enfin lire mes livres ! Je m’installe sur le siège près de la fenêtre et termine un autre livre dont il ne reste que quelques chapitres.
Une heure passe et je soupire de bonheur en posant le roman terminé. Akamai entre dans la bibliothèque et s’assied sur le siège, à côté de moi.
« Je me suis dit que tu voudrais savoir ce que nous avions prévu pour le plan d’attaque », propose-t-il, et j’acquiesce avec empressement.
J’aime être tenue au courant de ce qui se passe dans la meute, mais, comme Akamai est Beta, j’ai tendance à ne pas trop m’impliquer.
« Nous avons repéré leur emplacement, une cabane dans les montagnes. Nous allons partir ce soir et les attaquer aux premières lueurs du jour, quand ils ne s’y attendront pas », explique Akamai.
« C’est être un bon plan, on dirait. Sois prudent, s’il te plaît », dis-je à mon frère, qui se moque de moi.
« Tu devrais prier pour ces chasseurs, pas pour nous, petite sœur », ricane-t-il sombrement. « Nous désamorcerons leurs bombes, et, sans leurs armes, nous les tuerons dans leur lit. »
Je frissonne à ses mots, reconnaissante de ne pas avoir à les tuer moi-même.
Ne vous méprenez pas, si l’un d’entre eux venait sur notre territoire ou nous attaquait, moi ou ma famille, je combattrais aussi. Mais je n’aime pas particulièrement les attaques, je préfère la défense.
Akamai retourne auprès de mon père, et je me lève et commence à parcourir les étagères, à la recherche de ma prochaine lecture.
Je me hisse sur la pointe des pieds, et m’appuie sur une étagère qui m’arrive aux épaules comme ressort pour lire les titres des livres sur l’étagère la plus haute.
Je me fige lorsque je sens des yeux sur moi, et je réalise que je ne suis pas seule. Deux parfums arrivent à mon nez. L’une de bois de cèdre et de musc, l’autre de bergamote et de forêt.
« On dirait que notre petite souris a retrouvé la vue », dit Alpha Jarren à Alpha Dane.
Il a l’air satisfait, mais j’ai la chair de poule, et je n’ose pas regarder autour de moi. J’ai l’impression d’être une proie qu’on a mise au pied du mur.
« On dirait bien, mon frère. Mais alors, elle aurait dû voir que cette robe est courte. Et que ce n’est pas approprié en présence de tant de loups sans compagne », rétorque Alpha Dane, et je fronce les sourcils à ses paroles.
Pardon ?
« C’est exactement ce que je pense. Qu’en penseraient ses compagnons ? » commente Alpha Jarren, et mon cœur commence à battre à toute vitesse dans ma poitrine.
« Ah, tu vends la mèche, mon frère. Écoute son cœur battre, elle est au courant maintenant », ricane Alpha Dane, et j’inspire brusquement.
Compagnons ? Au pluriel ? ~Impossible… ~
Je me retourne lentement pour leur faire face. La description de Damon ne leur rendait pas justice, mais je ne suis pas sûre que la description de quiconque leur rendrait bien justice. Ils ne sont pas du tout comme je l’imaginais… Ils sont tellement mieux…
Ils sont tous deux grands, environ un mètre quatre-vingt, et Damon avait raison de dire que Jarren est un peu plus grand que Dane. Mais Dane est légèrement plus musclé.
Ils ont tous deux d’énormes épaules, des bras épais et la poitrine musclée mise en valeur par les tee-shirts moulants qu’ils portent.
Leurs visages sont identiques, ils ont des lèvres pulpeuses, des pommettes hautes et la mâchoire carrée. Jarren a des cheveux noirs, courts sur toute la tête et des yeux jaunes qui brillent.
Dane a des cheveux bruns courts sur les côtés, mais ils sont plus longs sur le dessus, et ils sont argentés et surprenants. Ses yeux sont plus orange que jaunes, comme un tigre.
Ils restent tous les deux silencieux pendant que je les observe pour m’imprégner de traits que je n’ai fait qu’imaginer ces derniers jours. Mes compagnons.
En plus de la peur et de la contrariété, je ressens un fort sentiment de fierté féminine de savoir que ces magnifiques spécimens sont mes compagnons.
Deux.
Jamais, dans mes rêves les plus fous, je n’aurais imaginé que la déesse de la Lune me bénirait avec deux compagnons. Je déglutis lorsqu’ils font un pas en avant, en même temps, et rendent la distance entre nous un peu moins grande.
« Tu aimes ce que tu vois, petite souris ? » Alpha Jarren fait un pas de plus vers moi, et un sourire amusé se dessine sur ses lèvres.
J’ignore sa question, trop choquée pour accepter leurs moqueries. « Depuis combien de temps vous savez que je suis votre compagne ? » leur demandé-je, en les regardant l’un après l’autre.
Ils se regardent avant de répondre. « Quand nous t’avons vu pour la première fois », répond Alpha Dane, et je fronce les sourcils.
« Et pourquoi vous ne l’avez pas dit ? »
« Parce que nous voulions que tu nous voies, petite souris », répond Alpha Dane.
« Et maintenant que tu nous as vus, nous pouvons tuer ces chasseurs et te ramener sur notre territoire », ajoute Alpha Jarren. Je le regarde, surprise.
Ça a du sens. Si un compagnon est Alpha, on s’attend à ce que sa compagne emménage dans leur meute.
« Pourriez-vous me laisser un peu de temps ? C’est un peu brutal pour moi. Je n’ai retrouvé la vue que ce matin et je ne m’attendais vraiment pas à ça », leur demandé-je, avec l’espoir de ne pas les offenser.
Leurs yeux s’adoucissent et je suis soulagée qu’ils n’aient pas l’air blessés.
« Bien sûr, petite souris. Nous allons te laisser du temps », dit Alpha Dane. Je lui souris, et c’est un sourire sincère qui le fait sourire en retour.
« Nous partons ce soir et serons de retour demain. Pourquoi ne parlerions-nous pas tous ensemble à notre retour ? » suggère Alpha Jarren, et j’acquiesce.
« Bien. Nous te verrons demain, petite compagne », Alpha Dane se penche en avant et dépose un doux baiser sur mon front.
Mon corps est englouti de chaleur à ce simple contact et à sa proximité.
Il se retire et Alpha Jarren me prend dans ses bras, il enfouit son visage dans mon cou et respire profondément.
Pendant une seconde, sa chaleur et son parfum m’enveloppent, et, celle d’après, il part, et les deux se dirigent vers la porte.
« Faites attention ! » leur crié-je.
Je sais qu’ils ont tout prévu, mais je serais stupide si je ne m’inquiétais pas. Ils se retournent tous les deux et me sourient.
« Tout ira bien, Leilani », répond Alpha Jarren, et Alpha Dane rigole.
Ils me laissent et je me dirige vers le siège près de la fenêtre pour réfléchir à tout ce qui vient de se passer.
***
J’ai du mal à dormir cette nuit-là. La maison a l’air vide. Je suis seule avec un des guerriers de mes parents ici. Tous les autres sont partis se battre.
J’ai proposé d’y aller aussi, même si je n’aurais pas aimé le faire, mais je voulais les aider. Malgré la guérison de mes blessures, mes parents et mes compagnons ont refusé de me laisser me joindre à eux.
Je jette un coup d’œil aux rideaux et vois que le soleil commence tout juste à se lever. Ils vont bientôt attaquer, si ce n’est ce qu’ils font maintenant.
L’inquiétude me fait mal au ventre et je chasse les pensées de mon esprit pour essayer de me concentrer et de me rendormir.
Je ne me souviens pas m’être rendormie, mais la lumière du soleil est forte et inonde la pièce. Je réalise que j’ai dû me rendormir pour me réveiller maintenant.
Je vérifie l’heure et constate qu’il est un peu plus de neuf heures. Je prends une douche et me prépare pour la journée, et choisis une robe, avant de me maquiller un peu.
Je prends mon petit-déjeuner seule, puis je m’installe sur le siège près de la fenêtre dans la bibliothèque, et j’attends avec impatience le retour de tout le monde.
***
Un mouvement près de la limite des arbres attire mon attention et je lève la tête du livre dans lequel j’étais plongée.
Akamai traverse l’herbe à grands pas avec deux guerriers. Du sang recouvre ses vêtements, mais il ne semble pas blessé.
Je me lève brusquement de mon siège et me précipite dans la maison. Je sors par la porte arrière et me cours vers lui.
Je jette mes bras autour de son cou, contente que le sang séché sur ses vêtements ne soit clairement pas le sien, il n’a pas son odeur.
« Tu vas bien ? Est-ce que tout le monde va bien ? » demandé-je rapidement, avant de regarder par-dessus son épaule.
Mon cœur est enfin soulagé lorsque je vois mes parents sortir parmi les arbres, l’air meurtri, mais toujours debout.
Si Akamai me répond, je ne l’entends pas, car je me précipite vers mes parents et les serre tous les deux dans mes bras.
« Où sont les Alphas ? » demandé-je. Et, mon cœur se serre quand les yeux de mon père s’adoucissent.
« Ils vont bien, mais ils ont été blessés, ma chérie », répond maman, et j’essaie désespérément de regarder par-dessus leurs épaules.
Mes yeux se posent sur Alpha Dane. Deux guerriers le portent, et l’aident à avancer en boitant vers nous.
Un gros bandage est enroulé autour de son genou gauche. La douleur et l’inquiétude m’envahissent alors que je cours vers lui.
Ses yeux s’illuminent lorsqu’il me voit et sourit. « Ce n’est pas aussi grave que ça en a l’air », déclare-t-il, et je fronce les sourcils à la vue du bandage ensanglanté. « Ce stupide chasseur m’a tiré dans le genou. »
Je fais brièvement le tour du reste de son corps, et, à part les bleus et les accrocs, il semble que ce soit sa seule blessure grave.
« Je suis si heureuse que tu sois de retour », dis-je, et il me sourit.
« Moi aussi », répond-il, et les guerriers l’emmènent à la clinique.
Je jette frénétiquement un coup d’œil autour de moi, pour essayer de trouver mon autre compagnon. J’ai l’impression de recevoir un coup de pied dans l’estomac lorsque je vois qu’on l’emmène vers la clinique, sur une civière.
« Jarren ! » Je crie son nom et me précipite vers lui.
Il lève les yeux de la civière et esquisse un sourire. « Salut, petite souris », me salue-t-il.
Je marche à côté de la civière pendant qu’ils le transportent à la clinique. « Que s’est-il passé ? » demandé-je, inquiète.
Des bandages recouvrent sa poitrine, son ventre et sa cuisse.
« Cet idiot a décidé d’utiliser son corps comme bouclier contre les tirs », lance l’un des guerriers d’un ton critique, avant de regarder prudemment Jarren. « Mes excuses, Alpha. »
« Ça semblait être une bonne idée sur le moment », grogne-t-il, avant de gémir de douleur alors qu’ils le transfèrent sur le lit d’hôpital.
« Nous allons l’emmener au bloc pour retirer les balles, mais il a de la chance qu’elles n’aient pas entaillé d’artères principales. Tu vas t’en sortir, Alpha », annonce le médecin.
Je glisse ma main dans la sienne et nos peaux se touchent pour la première fois. Les yeux de Jarren se baissent immédiatement sur nos mains entrelacées.
La chaleur traverse mon corps à son contact et je sais qu’il ressent la même chose.
« Leilani ? Nous devons l’emmener au bloc maintenant », la voix du médecin arrive à mes oreilles et je regarde Jarren, inquiète, et le trouve en train de me sourire.
« Ça va aller, petite souris », me rassure-t-il.
« Il vaut mieux », murmuré-je.
Avant de me dégonfler, je me penche et embrasse ses lèvres. Je me retire et il fronce les sourcils.
Il ne voulait pas que je fasse ça ?
« Quel genre de baiser était-ce ? » demande-t-il, pendant que les infirmières commencent à le sortir de la chambre.
« La prochaine fois, embrasse-moi correctement, petite compagne ! », crie-t-il alors qu’il disparaît. Je ne peux pas m’empêcher de rire.