C'était la semaine avant Noël, et la mère de Marie la rendait folle.
Tout ce que Marie veut, c'est rencontrer un gentil garçon et s'installer, mais sa mère insiste sur le fait qu'elle est trop vieille, trop ronde, ou trop difficile. Puis Holton entre dans sa boutique de fleurs, et la connexion est immédiate. Presque comme s'il était... son âme sœur ? Mais seuls les métamorphes ont des compagnons, et Marie n'a jamais rencontré de métamorphe auparavant.
MARIE
Marie était à l'arrière de sa boutique de fleurs, regardant son téléphone qui sonnait avec agacement. Elle n'avait guère envie de parler à sa mère en cette période chargée. Noelle Kriton n'était pas la personne la plus agréable qui soit.
« Marie, ma chérie », dit Noelle lorsque Marie décrocha. « Je voulais te rappeler d'être à l'heure pour la fête de Noël vendredi. Ça commence à dix-neuf heures. »
« Je sais, Maman », répondit Marie. « C'est toujours à la même heure chaque année. »
« Je vérifiais juste ! Tu viens accompagnée cette année ? »
« Non », dit Marie, espérant mettre fin à la conversation.
« Et ton ami Reggie ? C'est un homme charmant. »
Marie leva les yeux au ciel. « Et il préfère les hommes, Maman. »
Noelle émit un son désapprobateur. « Quel dommage. Tu n'es plus toute jeune. Tu devrais peut-être faire attention à ta ligne cette année, ma chérie. Perdre quelques kilos pourrait t'aider à trouver un homme. »
« Tes deux sœurs cadettes sont mariées avec des enfants. Tu ne veux pas la même chose ? »
Bien sûr, Marie rêvait d'un mari et d'enfants. Mais elle ne se contenterait pas d'un homme qui ne l'aimerait pas pour ce qu'elle était.
« À vendredi, Maman. » Marie raccrocha et vit Reggie qui la regardait d'un air compatissant.
Marie et Reggie étaient amis depuis des années, et elle l'avait embauché comme assistant quand elle en avait eu les moyens. Elle l'aimait comme un frère, et il la connaissait par cœur.
« T'en fais pas, Reg », dit-elle. « Finissons cet arrangement floral. Plus que sept jours avant Noël. » Elle alla chercher des rubans rouges, verts et dorés.
Marie savait qu'on la trouvait mignonne, pas belle. D'habitude, ça ne la dérangeait pas. Elle était petite et un peu ronde, alors que ses deux sœurs cadettes étaient grandes, minces et fières de leur apparence.
Marie avait hérité de la petite taille de sa mère mais de la silhouette de son père. Quand elle prenait du poids, elle s'arrondissait. Elle essayait de manger sainement et de faire de l'exercice, mais cela ne changeait pas grand-chose à sa morphologie.
C'était dur d'encaisser les remarques blessantes de sa mère sur le fait qu'elle était trop ronde pour garder un petit ami.
« Pourquoi tu décroches quand elle appelle ? Elle te fait toujours te sentir mal. » Reggie coupait les épines des roses rouges et blanches.
« Si je ne le fais pas, elle me fait culpabiliser de ne pas l'aimer. Joy et Valerie l'appellent tous les jours », expliqua Marie.
« Elles restent à la maison pendant que leurs enfants sont à la garderie. Normal qu'elles puissent appeler ta mère. Elles ont du temps à revendre. Toi, tu as un boulot à plein temps. »
« Ça ne compte pas pour Noelle Kriton. »
« Je suis désolé. » Reggie tendit les roses à Marie, qui les disposa en douze bouquets avec de petites fleurs blanches.
« Marie, on a un client au téléphone qui demande des décorations de table », appela Trisha, son autre assistante.
« Je ne suis pas sûre qu'on puisse le faire », dit Marie, mais elle décrocha le téléphone de la boutique. « Bonjour, Fleuriste Kriton. »
« Bonjour, j'ai vraiment besoin d'un centre de table », dit une voix masculine profonde. Marie sentit un frisson lui parcourir l'échine. C'était une voix très séduisante.
« Ça dépend de la taille », dit-elle, essayant de rester professionnelle. « Nous sommes presque complets. »
« Il faut juste que ce soit quelque chose qu'une mère qui adore Noël aimerait », dit-il. « D'habitude, je ne m'y prends pas si tard pour commander. »
Elle consulta son agenda. « J'ai un créneau libre aujourd'hui à dix-huit heures trente. La boutique ferme à dix-neuf heures. »
« Merci beaucoup, à tout à l'heure ! » Il avait l'air ravi.
Marie raccrocha et soupira rêveusement.
« Tu as l'air bien plus joyeuse », remarqua Reggie, notant son sourire. « Quelqu'un t'a invitée à sortir ? »
« Non, mais sa voix m'a fait de l'effet », admit Marie.
Reggie rit et termina un autre bouquet.
« J'espère qu'il est aussi beau que sa voix », dit-elle. « Grand, séduisant, célibataire. »
« S'il l'est, ma belle, saute sur l'occasion et emmène-le comme cavalier pour les fêtes. »
« Pas question. Aucun homme ne mérite de rencontrer ma famille. » Elle ne pouvait pas infliger ça à quelqu'un.
Ces derniers temps, Marie n'aimait plus tellement les fêtes. Chaque année, sa mère répétait les mêmes choses. Trouve un mari, et arrête d'être grosse. Tu ne rajeunis pas.
Elle avait trente-trois ans, ce n'était pas vieux. Ses deux sœurs avaient épousé leurs petits amis de fac et avaient des enfants, et Marie adorait ses nièces et neveux. Le problème, c'est qu'ils rappelaient à tout le monde que Marie était célibataire et sans enfants.
« Marie, j'ai besoin de toi ! » appela Trisha, lui demandant de venir à l'avant de la boutique. Elle passa le reste de sa journée à aider les clients et à faire des arrangements floraux. Elle n'eut même pas le temps de déjeuner tellement il y avait de clients à servir.
Si la boutique marchait bien cette saison, elle envisagerait d'embaucher une personne de plus. Elle préférait arranger les fleurs plutôt que de travailler à l'accueil.
« Marie, ton rendez-vous de dix-huit heures trente est là », dit Trisha, entrant dans l'arrière-boutique.
Sans lever les yeux de son travail, Marie répondit : « Dis-leur que j'arrive bientôt. Tu peux les conduire dans la salle de réunion. » Elle voulait d'abord finir ce centre de table. Il ne lui restait que les dernières fleurs à ajouter.
« Marie, vas-y. Je l'ai vu, et je pense qu'il pourrait être parfait pour toi. » Reggie la poussa pour finir l'arrangement à sa place.
Levant les yeux au ciel, Marie retira son tablier. Elle lissa ses cheveux en désordre et se dirigea vers la salle de réunion. Trisha se tenait devant la porte et lui fit un pouce en l'air quand elle passa. Ce type était-il vraiment si beau ?
Quand Marie entra dans la pièce, elle en eut le souffle coupé un instant. Son cœur s'emballa. Bon sang ! Il était aussi beau que sa voix le laissait présager.
Il était très grand, au moins trente centimètres de plus qu'elle, et musclé, portant un beau costume qui moulait sa poitrine. Mais ses cheveux blond clair et ses yeux verts doux lui donnaient un air avenant.
Il se tenait près du mur du fond, regardant certains de ses meilleurs arrangements floraux. Elle allait penser à lui ce soir. Cet homme l'attirait terriblement.
« Bonjour, je suis Marie Kriton. Je suis désolée, je n'ai pas eu votre nom au téléphone. » Elle tendit la main. Quand il la prit, sa grande main chaude la fit faiblir. Elle dut se forcer à la lâcher après la poignée de main.
« Je suis Holton Bell », dit-il. « Merci de me recevoir. J'ai été débordé par le travail, et j'ai oublié de commander plus tôt. »
Marie essaya de se rappeler où elle avait entendu ce nom. Puis elle se souvint. « D'habitude, c'est votre assistante qui vient », dit-elle, pensant à une jolie femme aux yeux verts similaires.
« Oui, ma sœur Ruby. Elle a démissionné il y a environ un an, et je n'ai pas trouvé de nouvelle assistante qui me convienne. Je ne sais pas comment commander des fleurs ; Ruby s'en occupait toujours. »
Marie essaya de ne pas rire. Ce grand homme, qui avait l'air si fort, lui demandait de l'aide pour quelque chose ?
« D'accord, asseyez-vous et voyons ce qu'on peut faire. » Elle désigna la table et ouvrit ses livres de photos. Les images aidaient toujours les gens à choisir. « Voici nos choix les plus populaires. » Elle lui montra chaque photo.
« Hmm », dit-il après quelques pages, « vous avez quelque chose de plus hivernal et moins Noël ? Je voudrais qu'elle puisse apprécier les fleurs même après les fêtes. »
« Pas dans ce livre », dit-elle, « mais je peux vous montrer des options et faire un exemple. »
Holton lui adressa un grand sourire qui fit battre son cœur plus vite. « Ce serait parfait. Merci, Mademoiselle Kriton. » Il se leva, et Marie fit de même.
Elle leva les yeux vers lui. Il était vraiment beaucoup plus grand qu'elle. Il lui tint la porte ouverte quand ils quittèrent la pièce.
« Merci, Monsieur Bell. » Elle lui adressa un sourire timide.
« Holton, s'il vous plaît », dit-il. « Monsieur Bell, c'est mon père. »
Elle rit. « Et Mademoiselle Kriton, c'est ma mère. Vous pouvez m'appeler Marie. » Elle l'emmena dans l'arrière-boutique, où Reggie terminait son dernier arrangement.
Les yeux de Reggie s'écarquillèrent quand il vit Holton de près. Puis il fit un clin d'œil à Marie et mit l'arrangement au réfrigérateur avant de les laisser seuls.
« Attendez », dit Holton, une fois seuls. Sa voix avait soudain changé. « Mademoiselle Kriton est votre mère. Est-ce que... êtes-vous apparentée à Noelle Kriton ? »
Oh non. Comment ce bel homme connaissait-il sa mère, entre toutes ? Marie espéra que sa mère ne gâcherait pas tout.